Maureen O'Sullivan, un adieu à la hauteur de l'événement



  • Jungle de pierre.

  • Oui. Fabriquée par des hommes.

  • Indigènes vivrent ici ?

  • Oui, ils vivent et travaillent ici.

  • Pourquoi ?

  • Pour... Pour leur permettre de concentrer leurs efforts. De faire les choses plus vite. De gagner du temps.

  • Gagner temps ? Pour quoi faire ?

  • Chéri, tu viens de me poser une question à laquelle aucun savant ne peut répondre.




Maureen O'Sullivan fait ses adieux à notre chère Jane



1942, voilà déjà 10 ans que Tarzan, l'homme singe réalisé par W. S. Van Dyke d'après le roman d'Edgar Rice Burroughs, est sorti. Dix années d'aventures qui vont trouver un tournant avec le sixième opus de la saga "Les Aventures de Tarzan à New York", dernier film à mettre en avant la sublime Maureen O'Sullivan dans le rôle phare de ''Jane'', la belle de l'homme singe. Maureen Paula O'Sullivan, actrice irlandaise à qui je tiens à rendre un hommage, elle qui a contribué à enflammer les périples de Tarzan par sa performance brulante de désir. Une comédienne qui aura réussi à s'imposer en offrant une attraction animale via une alchimie sexuelle incroyable avec Tarzan, auquel elle vole plus d'une fois la vedette. Une escapade romantique qui aura connu bien des formes, la plus symbolique étant le passionnant ballet aquatique avec sa fameuse tenue légère qui lui vaudra de subir l'application de la censure du code de production Hays. Dix années de bons et loyaux services auxquels O'Sullivan mettra fin lors de l'achat des droits de la licence de MGM par la ''RKO'' (Radio-Keith-Orpheum Pictures), production indépendante de films de cinéma. Un au revoir pour Maureen O'Sullivan qui aura au moins le mérite de partir avec les honneurs à travers un des meilleurs épisodes de la saga.


Les Aventures de Tarzan à New York réalisé par Richard Thorpe, vient pleinement me réconcilier avec le cinéaste qui m'avait profondément agacé avec sa proposition de 1936 "Tarzan s'évade", qui n'était qu'un plagiat de séquences piquées sur d'autres films pour très peu de nouvelles images; mais qui avait réussi à mieux me faire passer la pilule par la suite comme en 1941 avec Le Trésor de Tarzan. Avec ce sixième périple, le cinéaste frappe un coup fort en projetant Tarzan (Johnny Weissmuller), Jane (Maureen O'Sullivan) et cette chère Cheeta, au cœur de la civilisation urbaine à New York, où notre trio part à la recherche de Boy (John Sheffield), enlevé par des fripouilles appartenant au monde du cirque. Un récit durant lequel l'homme singe va être confronté pour la première fois à une grande ville, ce qui va amener son lot de rebondissements et de situations cocasses. Ironie de la situation, une localité qui réinvente la saga qui prend un véritable bol d'air frais dans une ville. D'un côté, un bon film d'aventures dans lequel on ne s'ennuie pas une seconde; de l'autre, une comédie aux accents parodiques où on rigole du décalage de la civilisation à celui du monde sauvage via le comportement de Tarzan, qui n'est clairement pas à sa place. Délicieusement optimiste et benêt par son idéalisme simpliste qui met en avant la loi comme quelque chose de très bien et gentil sans y apporter la moindre nuance, on se régale néanmoins de la sincérité de l'histoire que l'on regarde avec une conciliance affectueuse. Une approche typique de la licence.




  • Savez-vous lire, Tarzan ?

  • "Lire" ?

  • Oui, lire. Des livres. Connaissez-vous Hamlet de Shakespeare ?

  • Tarzan lire pistes dans la jungle, lire nuages dans le ciel. Avocat connaître Kinsin-oupa ?

  • Kinsin... quoi ?

  • ''Kinsin-oupa''. Guérir morsures serpents. Chaque bébés dans jungle connaître.



Un spectacle qui dans sa simplicité maîtrise parfaitement son rythme à travers une succession de séquences totalement délectables où on jongle continuellement entre le rire et la tension. Niveau humour, on s'esclaffe lors de la tentative d'essayage de costumes chez le tailleur chinois, où notre cher Tarzan avec son corps massif déchire chaque tenue. De même, lorsque celui-ci se retrouve pour la première fois dans une ''maison sur roue'', pardon, un ''taxi'' avec la découverte de la ''danse de guerre'', pardon, de la ''radio''. La séquence la plus drôle étant lorsque Tarzan se retrouve à prendre une ''pluie bien chaude'', pardon, une ''douche'' tout habillée en poussant son hurlement de manière amusante. En matière de pitreries, Cheeta en tient une bonne couche, prenant une place bien plus importante qu'à l'habitude. Elle met en vrac une chambre d'hôtel, joue avec le déverseur d'eau d'un aéroport, fait la pitre au téléphone, ou encore s'amuse à faire peur aux hôtesses d'un pub où elle met un véritable souk dans les chapeaux. À chaque fois, en éclatant allègrement d'un rire bien gras. Chacune des découvertes de ce duo sauvage entraîne une situation cocasse dans laquelle Jane joue les redresseuses de torts. Niveau action, le spectacle tient ses promesses avec une première partie dans la jungle avec l'attaque d'un lion qui manque de près de dévorer un pauvre bougre prisonnier d'un filet, jusqu'à la charge des Jaconis qui manquent de brûler vif Tarzan et Jane. Des péripéties qui pour l'univers de Tarzan sont anodines et qui trouveront une véritable originalité dans les actions situées à New York. C'est là-bas qu'aura lieu le chapitre le plus excitant : ''l'évasion du tribunal''. Une scène haletante avec Tarzan qui se retrouve à sauter de building en building. Un passage étonnamment bien réalisé qui impressionne, jusqu'à trouver son moment clé lors de l'escalade du pont de Brooklyn, où l'homme singe plonge tête la première dans l'Hudson. Le final est à la hauteur avec une lutte acharnée dans le cirque où les éléphants vont une fois encore jouer un rôle primordial. Des proboscidiens très intelligents qui tout au long du récit nous offre des belles performances de dressage.


Johnny Weismuller le champion olympique de natation sous les traits de Tarzan offre une performance toujours aussi amusante qui parvient à rendre une étonnante sensibilité sur un visage pourtant presque impassible. La faculté du comédien à basculer d'un homme passif et innocent à celui d'une bête féroce comme lors de la scène du jugement, est stupéfiante. Jugement durant lequel Tarzan va se livrer à un échange intéressant avec un avocat. Un Weismuller sur lequel l'âge commence à avoir son emprise, avec un corps athlétique qui commence à perdre de sa superbe. Maureen O'Sullivan dans le rôle de Jane Parker est une fois de plus à croquer ! La comédienne réchauffe l'écran de son sourire resplendissant sur une performance d'une saisissante douceur qui désoriente par ses nombreux charmes. Elle porte Tarzan à bout de bras en jouant la guide spirituelle de l'homme singe qui sans sa Jane serait complètement désorienté. Pas de Jane, pas de Tarzan. Deux personnages complémentaires que les six films de la saga (avec ce duo) auront subtilement construits via une élaboration dramatique soignée. Du bon travail ! John Sheffield en tant que ''Boy'', le fils prodigue continue d'apporter de l'énergie à la licence à travers son tempérament enflammé qui une fois encore va se retrouver au centre du récit. Une performance niaise qui cadre avec le personnage. Le reste de la distribution fait le taff, avec la superbe Virginia Grey avec sa voix enchanteresse pour Connie, Charles Bickford pour Buck, Paul Kelly pour Jimmie, Chill Wills pour Montford, Cy Kendall pour le colonel Sargent, Russel Hicks pour le juge Abboston... Seul petit regret, la disparition de Tumbo par le jeune Cordell Hickman, apparut dans le film précédent : ''Le Trésor de Tarzan''.



CONCLUSION :



Avec Les Aventures de Tarzan à New York, Richard Thorpe se pose enfin pleinement en tant que cinéaste de valeur pour la licence qu'il avait si mal débuté pour une ascension qui trouve ''sa'' plus belle réussite avec ce sixième opus. Une aventure dont il faut louer sa capacité à savoir jongler entre deux mondes distincts mais Ô combien dangereux, celui de la brousse et celui de la mégapole. Un film divertissant construit sur une histoire simple, mais amusante qui va droit à l'essentiel. Une ultime aventure pour notre couple vedette qui durant dix années aura offert un duo convaincant avec un Johnny Weismuller charismatique et une magnifique Maureen O'Sullivan, qui dit adieu à la saga avec cette ultime aventure.


Un cycle qui s'achève avec les honneurs.




  • Danse de guerre ! Où être sauvages ?

  • Hahaha !!! Il n'y a pas de sauvages, chéri. La musique elle vient de cette petite boîte. On appelle ça une radio.

  • Rara... Radio.

  • Oui.
    ( Une femme se met à chanter de l'opéra)

  • Femme malade ! Pleure pour appeler sorcier.

  • Hahaha !!! Tu devrais être critique musical, chéri.


B_Jérémy
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le 28 août 2022

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