The Red Ball Express mêle l’approche documentaire, notamment avec ses sommaires dont les enjeux sont explicités par un narrateur humaniste, à un éloge de la camaraderie pour lequel la fiction compte en ce qu’elle lisse les relations entre soldats, n’en gardant que ce qui sert son propos. Aussi le racisme, que les premières moutures du projet devaient dénoncer, reste sporadique, le film prônant l’intégration bienveillante qui change l’armée en une vaste famille dans laquelle les Blancs et quelques Noirs rient tous ensemble, ces derniers ayant le rythme dans la peau et le blues au bout des lèvres. Aussi l’entreprise de Budd Boetticher, si elle réussit à rendre compte de la lourdeur des opérations, fruit d’un minutieux travail de recherches documentaires en amont, s’avère-t-elle contestable : en jouant sur les deux tableaux, en confondant le vrai et le faux, elle brosse le portrait fantasmé d’un corps militaire qui ne sert qu’à rendre hommage aux héros tombés.


Propagande, donc, que le réalisateur avait déjà pratiquée dans The Fleet That Came to Stay, commande de l’armée américaine. L’intérêt de visionner The Red Ball Express en 2021 est ainsi limité, cantonné à la mise en scène de Boetticher, rigoureuse et dotée de quelques partis pris notables : présence fantomatique de l’ennemi dont nous entendons et voyons les coups de feu mais jamais les corps – ce qui à la fois déshumanise l’Allemagne et tend vers la parabole universalisable –, travail de la profondeur de champ insérant les personnages dans un environnement hostile qui leur confère des tâches individuelles et une identité collective, caractérisation forte des femmes ou engagées dans la résistance active ou tenant tête aux hommes. La bonne humeur générale, brutalement ternie lors des attaques, saura également divertir le spectateur contemporain sans pour autant le marquer.

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le 30 mars 2021

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