«Tu peux changer de femme, tu peux changer de religion, mais tu ne peux pas changer d'équipe de foot !»

Ce film est le meilleur que j'ai vu depuis un bon moment ! Le héros, Eric, est un postier de Manchester qui nage dans les problèmes. Il vit avec ses deux adolescents, le plus jeune sèche les cours pour rester enfermé dans sa chambre avec ses potes, et le plus vieux (dix-neuf ans) deale de la drogue et occasionnellement garde le flingue du caïd du coin. Il doit en plus de ça revoir son ex-compagne depuis la naissance de leur petite-fille qu'ils gardent à tour de rôle pendant que leur fille, la mère du nourrisson, va en cours. Sa vie lui semble atroce alors le soir, il pique un peu de shit à son fils et se roule un pétard pour oublier ses ennuis en questionnant le poster de son idole de toujours : Éric Cantona.

Celui-ci lui apparaît finalement un soir, dans sa chambre, pour lui donner des conseils à la Cantona. Après l'épisode des mouettes que tous les amateurs de football connaissent, Cantona est toujours aussi féru de bons proverbes et sert à Eric ce qu'il est bon d'appeler de la philosophie de comptoir. Eric suit petit à petit ses conseils et finit par reprendre sa vie en main, tandis que Cantona s'efface de plus en plus comme son admirateur reprend les rênes.

Le cadre du film peut paraître déprimant : on est quand même chez Ken Loach. Le héros a une maison un peu minable, un frigo rempli de bières, des enfants remplis d'ennuis, des collègues simples qui passent leur vie au pub à regarder jouer leur équipe. C'est un film sur des gens simples qu'on voit finalement peu au cinéma alors qu'ils constituent l'essentiel de la population mondiale. Qui vit à New York et travaille comme styliste, producteur de musique ou chef d'entreprise ?

Les acteurs sont tous bons et convaincants, et Éric Cantona est bluffant. Il joue génialement bien l'espèce de génie qui apparaît miraculeusement à son admirateur pour lui insuffler des mots magiques et mystérieux de philosophie de café, du bon sens en somme, sans prétention et avec bonne humeur. "La plus noble vengeance est le pardon", "Il faut savoir prendre des risques", "Il faut se surprendre soi-même pour surprendre les autres", etc. C'est fait avec subtilité : tout le monde sait que ce sont des grosses ficelles, mais tout le monde marche. C'est toujours fascinant ce genre de phénomène : quand quelqu'un tire son moral et sa philosophie d'une icône de la culture populaire (ici footballistique) et se la ré-approprie. Certaines personnes trouvent le courage d'aller de l'avant en écoutant Madonna, en regardant des films de superhéros où le garçon timide se transforme en justicier, et d'autres en invoquant un footballeur à la langue bien pendue et au caractère bien trempé. C'est toujours intéressant et finalement aussi bon à prendre que n'importe quelle autre philosophie, tant que ça marche.

Dans ce film, qui ressemble parfois à une vraie comédie, surtout vers la fin, ça marche. Ça marche d'enfer, même.
Mindfulista
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le 25 août 2010

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