Le deuil fait partie de ses sujets sensibles qu'il n'est pas toujours facile d'aborder au cinéma, que ce soit en tant qu'"auteur", acteur ou même spectateur. Toutes émotions qui en découlent, la colère, la tristesse, les remords, la culpabilité et la peur, l'impossibilité d'oublier, la nécessité de vivre avec ; mais aussi le besoin peut-être égoïste mais nécessaire de prendre ses distances, que cela soit dans l'espace ou vis-à-vis des personnes partageant ce deuil avec nous, sans pour autant le vivre de la même façon.

Ce sont tous ces thèmes- là et d'autres encore que Love Life, réalisé par Koji Fukada, s'attache à relater avec beaucoup d'émotions. Emotions transmissent évidemment par le scénario, mais également par une somptueuse mise en scène notamment ces magnifiques contemplations de cette banlieue japonaise vue d'un balcon où l'on voit également nos protagonistes évolués tel un grain de sable dans l'univers ; donnant une saveur à la fois très personnelle et universelle au film.

Au-delà du deuil le film aborde également le statut particulier de famille recomposée, dans un Japon où cela ne semble pas encore pleinement accepté, d'un amour qu'on a quitté pour un autre, ou qui est parti mystérieuse avant de soudainement réapparaitre au moment le plus nécessaire et auquel on a toutefois besoin de se rattacher, de retourner comme une façon de se réfugier dans le passé pour mieux se préparer à affronter l'avenir.

Le deuil reste ainsi donc le sujet central du film et parvient à être abordé sous un prisme un peu novateur, de l'inévitable nécessité et peur de revenir pleinement sur les lieux de l'accident, d'autant plus quand il s'agit d'un banal "accident domestique", lieux de l'accident que même la caméra elle-même semble aborder avec une certaine pudeur et un recul.

Y sont abordée également la difficile intégration dans la vie entre autres professionnelle des personnes malentendantes, l'utilisation du langage des signes rajoute d'ailleurs une forme de poésie au film, puisqu'il y est question de la difficulté de se faire comprendre pour ces personnes, mais également de manière beaucoup plus singulière l'exclusion qu'un être peut ressentir devant une conversation utilisant ce langage. Le réalisateur aborde également l'aide apportée aux sans-abris et de manière plus globale la vie dans les banlieues japonaises…

Un film donc très touchant, aussi bien intimiste que contemplatif ; abordant avec justesse les différentes étapes d'un deuil de protagonistes partagés entre une fuite vers leur passé et le courage d'avancer tant bien que mal l'un avec l'autre. La scène finale les voyant se balader de loin, ensemble, mais séparés par une présence invisible et constatant que l'autre ne va pas forcément dans la même direction que vous, vous poussant à courir vers lui, représente métaphoriquement tout le propos du film.

RangDar
8
Écrit par

Créée

le 3 juin 2023

Critique lue 632 fois

15 j'aime

3 commentaires

RangDar

Écrit par

Critique lue 632 fois

15
3

D'autres avis sur Love Life

Love Life
Plume231
6

La Réprouvée !

La longue introduction est, pour moi, la meilleure partie de ce film de Kōji Fukada. Tout est lié, jusqu'à la moindre touche de couleur vive, à l'apparence du bonheur. Pourtant, quelques anicroches...

le 15 juin 2023

22 j'aime

1

Love Life
RangDar
8

Critique de Love Life par RangDar

Le deuil fait partie de ses sujets sensibles qu'il n'est pas toujours facile d'aborder au cinéma, que ce soit en tant qu'"auteur", acteur ou même spectateur. Toutes émotions qui en découlent, la...

le 3 juin 2023

15 j'aime

3

Love Life
Electron
8

Le profession de foi de Koji Fukada

Bien qu’en anglais, le titre est très parlant. Ce que nous annonce Fukada, c’est sa foi en la vie et l’amour, même si Love life nous montre que la vie n’est pas qu’une succession de bons moments à...

le 12 juin 2023

14 j'aime

Du même critique

Le Kid de Cincinnati
RangDar
6

Steve McQueen de cœur

L'histoire est assez classique, elle peut faire penser à Rocky, ou bien surtout à l'arnaqueur sorti quatre ans plus tôt ; mais avec du poker à la place de la boxe ou du billard. Steve McQueen y...

le 27 juin 2023

19 j'aime

10

Le Train
RangDar
7

La valeur de la vie ou le prix de l'œuvre ?

Réalisé par John Frankenheimer, Le Train voit son acteur principal Burt Lancaster, incarner le rôle de Paul Labiche, leader d'un bastion de résistants, amoindri dans la France encore occupée d'août...

le 24 janv. 2023

19 j'aime

3

Le Colonel Chabert
RangDar
8

Ressurgi du passé

Excusez ce potentiel manque de culture littéraire, mais je n'avais jamais eu l'occasion de lire de Balzac avant ma lecture récente du Colonel Chabert ; bien sûr je connaissais l'individu, j'avais...

le 7 févr. 2023

19 j'aime

16