Faire un film sur une correspondance représente toujours un défi. Comment traduire ce que la lettre ne dit pas ? Comment dévoiler les forces qui poussent à écrire, surtout si celles-ci contiennent tant de choses contraires aux libertés qu’elles proclament ? C’est donc armé d’une solide curiosité que je suis allé avoir madame de Sévigné.
Tout d’abord, il y a l’image, la photographie plus précisément, associée à la lumière, donne le ton du film et celui d’une époque où on ne nomme pas les choses et les deux sont une réussite qu’il faut souligner. Ensuite il y a les dialogues, c’est là que je voyais le plus gros risque pour ce film et bien non, les dialogues sont à la hauteur. Les célèbres lettres de la marquise de Sévigné y sont pour beaucoup et c’est tant mieux. Mais, car il y a un « mais », à trop vouloir féminiser au sens féministe, le film finit par desservir ce qu’il prétend défendre. On sait qu’une femme, aussi noble fût-elle, ne servait que de ventre, de compte en banque et parfois les deux à cette époque. La mise en scène s’appesantit lourdement sur cet aspect de la vie au XVIIIe siècle sans trop montrer que les femmes étaient aussi toujours astucieuses et intelligentes pour contourner ces virils obstacles. Donc un féminisme qui se désert lui-même, une lourde charge sur la psychologie de la mère qui aurait mérité d’être plus subtile et malheureusement des actrices qui malgré leur talent indiscutable peinent à donner vie au film. Pourtant on ne s’ennuie pas et c’est déjà ça.