Réalisé par l'un des trois Sergio du western italien, avec Léone et Sollima, Sergio Corbucci le cinéaste le plus anarchisant et le plus outrancier des trois, auteur de quelques incontournables du genre comme Django ou Companeros, ce western Zapatiste concocté sous forme de comédie pocharde et grossière, est l'une des dernières réussites du genre.
Réalisé en 1972, alors que le Trinita de Barboni a commencé à faire dériver le genre all'italiana, du spaghetti au fayot, Che c'entriamo noi con la rivoluzione?, sonne comme un questionnement existentiel catastrophiste de la part d'un acteur de théâtre italien individualiste à la gestuelle surdimensionnée, qui se retrouve malgré lui embrigadé dans ce grand mouvement de l'histoire mexicaine. Le génialissime Vittorio Gassman, prête ses traits au personnage de Guido Guidi qui partagera ses aventures rocambolesques avec un prêtre interprété par Paolo Villaggio, acteur redondant de la comédie italienne.
Au-delà de l'aspect purement outrancier et goguenard, typique de la comedia dell'arte, caractérisant la plupart des œuvres de Sergio Corbucci, ce qui frappe avant tout c'est l'incroyable inventivité qui s'en dégage. On y croise tout une palette de personnage typiques du genre, un pilote d'avion italien qui porte le nom de Garibaldi le célèbre "père de la patrie" italienne, sauf que son prénom est Peppino, un général despote à qui l'espagnol Leo Anchoriz prête ses traits, son pendant révolutionnaire interprété par Eduardo Fajardo autre acteur incontournable du genre, là on est dans le schéma narratif classique, mais c'est surtout dans des scènes complètement "autres" que le film gagne son originalité. Les péons mexicains manchots, l'énorme matrone Zapatiste leader de gang, les multiples bébés héritiers d'Emiliano Zapata que l'on chargent dans un avion avant de les déposer un à un dans un couvent... ça foisonne d'idées de mise en scène, et c'est ce qui caractérise le mieux la façon de faire de cet auteur génial du western transalpin qu'était Sergio Corbucci.
Doublée d'une vitalité et d'un rythme effréné, cette comédie westernienne souvent grossière et tendancieuse, à laquelle il ne faudrait pas grand chose pour basculer dans le ridicule trouve toujours de part le génie de son auteur le moyen de contrebalancer ses excès dans un lyrisme éblouissant quasi Fellinien et une ambiance onirique et étrange.
Ajouté à la mise en scène de Corbucci, le jeu du génial Vittorio Gassman qui exulte littéralement tout en cabotinage en excès de verbes, à la limite du trop plein, parfois pitoyable, toujours grandiose... et vous obtenez une perle du genre à l'italienne qui sans atteindre les sommets oniriques et étranges d'un Django ou le parfait équilibre comédie-action d'un Companeros, réussit à divertir tout en restant imaginatif et remarquablement bien réalisée.
La partition musicale d'il maestro Ennio Morricone, accompagne magnifiquement, une fois n'est pas coutume, cette fausse comédie, faux western, entre les deux, sans vraiment en être,... enfin bref cette perle rare qu'il se faut de redécouvrir pour prendre conscience du foisonnement d'idées et d'originalités qui découlaient du cinéma de genre transalpin .