On sait en 2014 que "Match Point" n'aura été au final qu'un accident heureux, une anomalie dans la filmographie de Woody Allen, ce dernier ayant rapidement retrouvé "ses marques" fantaisistes en Europe…
"Match Point", film charnel, sombre, presque désespéré, semblait marquer en 2005 une réelle révolution dans l’œuvre que l'on croyait bouclée de Woody Allen, dont le style pourtant si caractéristique était à peu près méconnaissable ici. Il est vrai néanmoins que "Match Point" travaillait en profondeur certains des grands thèmes alleniens : l'infidélité, la passion, l'horreur des crimes sans châtiments (Dostoïevski en référence claire), mais Allen y ajoutait, d'une manière plus surprenante, une vision acerbe du système anglais de castes, et construisait un environnement "politique" plus pertinent que son habituel petit monde new-yorkais.
Mais ce qui frappe toujours dans "Match Point", c'est la manière redoutable dont Allen, à travers une mise en scène (trop ?) classique mais sèche, rapide et précise, construit la logique implacable de son récit, et fait culminer la tension dans une série de scènes tour à tour déchirantes et malaisantes... Juste avant le dernier coup du sort, abolissant sans aucune pitié toute notion de justice, et nous abandonnant avec une vision terriblement pessimiste, voir tragique (au sens "classique" du terme) du destin des hommes...
[Critique re-construite en 2014, à partir d'éléments écrits en 2005 et 2009]