Par Murielle Joudet

« Un homme, une femme, de l'air » : cette réplique d'un personnage de The Day he arrives pourrait résumer la direction actuelle du cinéma de Hong Sang-Soo, qui donne peu à peu l'impression de vider ses films de tout ce qui pourrait entraver ce trio magique. The Day he arrives ressemble en cela à une épure, un croquis, notamment par le choix d'un noir et blanc adamantin (celui-là même de la Vierge mise à nu), toujours très contrasté, et d'un Séoul enneigé et poudreux où les corps douillets des personnages évoluent par petits pas précipités et gestes frigorifiés.

Un homme, une femme, de l'air, une scène du film le dit encore mieux, l'une des plus belles de sa filmographie : un groupe d'amis embrumé par l'alcool sort du restaurant et attend que les taxis défilent. Le trottoir, lieu-pivot de son cinéma, se vide, ne reste plus qu'un homme et une femme, et un regard amusé suffit à signifier qu'ils prendront le même taxi. La scène servait également de teaser cannois, teaser magnifique qui défilait à l'envers et rendait le propos plus explicite : les amis revenaient sur leur pas encombrer le couple, et ce rassemblement retrouvé, c'était encore du Hong Sang-Soo.

The Days he arrives est à l'image de cette scène, pris dans une logique de décharnement où surgit, au bout de la soirée et de l'épuisement, l'évidence d'un couple - situation originelle qui revient plusieurs fois à la surface du film, lancinante. Cette manière insolente qu'a Hong Sang-Soo de ne plus vraiment rien raconter pour aller toujours plus frontalement vers cette image essentielle correspond également au temps du tournage, qui de film en film se réduit. Le tournage d'Oki's movie avait duré treize jours, celui de The Day he arrives seulement sept. On dirait qu'HSS dessine avec ses films des cercles concentriques de plus en plus resserrés autour de son image chérie : le baiser, l'étreinte, le renfrognement d'un corps sur l'autre. Un jour peut-être n'aura-t-il besoin que d'une seule journée de tournage, un lieu, deux acteurs, pour récolter un plan unique, le silence d'une peinture. (...)

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le 4 avr. 2014

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