« Mimic »... pas vraiment le titre le plus glamour de l'histoire du cinéma...
Une accroche des plus ridicule: « Dans les bas-fonds du métro de New York, quelque chose a survécu... » Prononcé avec une voix bien rauque, on se croirait dans un mauvais nanar.
Pourtant rien que voir le nom de Guillermo Del Toro sur la jaquette me met l'eau à la bouche et me rend hystérique.

Au vu du générique de début, le film s'annonce grandiose. Il faut dire que le concepteur de ce générique n'en est pas à son coup d'essai. Kyle Cooper s'est déjà fait la main sur le générique de « Seven » pour ne citer que celui-là. Il frôle ici le sublime avec un montage épileptique de plans d'insectes vivants ou épinglés, de photos d'enfants elles aussi épinglées, d'articles de journaux... Le tout dans des tons vieillis, et accompagné d'une musique majestueuse.
L'ambiance qui est posée ici est celle d'un conte morbide.
Les premières séquences du film vont d'ailleurs dans ce sens: l'hôpital pour enfants n'a rien de réaliste et ressemble plus au dortoir de l'orphelinat de « L'échine du diable » (film que Guillermo Del Toro réalisera quelques années plus tard); la séquence où Susan introduit les « Judas » dans les égouts remplis de cafards est traitée de façon intemporelle et stylisée, toujours dans cet esprit de conte...
Et puis...
Et puis, soudain, le film perd cette ambiance et se veut plus réaliste. Seul l'enfant autiste et son père sont encore développé dans cet esprit de conte intemporel, et finissent par sembler complètement hors sujet.
Comme si Gepetto et Pinocchio erraient dans le New York contemporain...

A la recherche de documentation sur « Mimic », je suis tombé par hasard sur le commentaire d'un spectateur déçu; un commentaire loufoque mais finalement symptomatique du traitement réaliste que Guillermo del Toro donne à son film.
Ce spectateur essaie de prouver, arguments scientifiques à l'appui, que les « Judas » n'ont pas pu muter aussi vite et qu'il est impossible qu'ils aient développé le mimétisme humain.
Extrait: « L'évolution est un processus bien plus complexe et surtout bien plus long, en particulier pour un changement de phénotype aussi spectaculaire et aussi avantageux pour l'espèce. »
Bien sûr, on pourrait lui répondre qu'il ne s'agit que d'un film et qu'il ne faut pas y chercher de logique scientifique. Mais on aurait tort, car ce n'est pas la question du « vrai » que met en avant ce commentaire, c'est la question du « vraisemblable ».

Dans les premières séquences, alors que le film baigne encore dans une atmosphère de conte, on nous pousse à croire en une épidémie qui décimerait tous les enfants de New York. Le conte étant propice à ce genre d'évènement étrange et tragique, on y croit aveuglément sans y chercher de justification scientifique.
Cette épidémie n'a rien de « vrai », de réaliste, mais elle nous paraît « vraisemblable » puisque cohérente avec l'univers au sein duquel elle se produit.
Lorsque ce même univers devient plus réaliste, le donne change. On nous pousse à croire aux « Judas », à leur mutation, à leur mimétisme... Mais le personnage principal étant scientifique, et le monde représenté étant sensiblement le nôtre, on ne peut plus croire aveuglément; on veut entendre des explications plausibles qui, même si elles n'auront rien de vrai, paraîtront au moins « vraisemblables ».
Or, ces explications n'arrivent jamais, ou sont bâclées en quelques répliques incohérentes.
Si bien qu'on finit par ne plus croire en l'histoire qu'on nous raconte...

Le traitement des créatures participe aussi à ce manque de vraisemblance. Si Guillermo Del Toro avait travaillé l'atmosphère de conte tout le long de son film, les créatures auraient plus facilement trouvées leur place, et auraient paru plus crédibles.
Au contraire, dans l'environnement réaliste qu'il développe, elles paraissent complètement artificielles, et frôlent parfois le ridicule.

Malgré ces maladresses, on ne peut qu'admirer les talents visuels de Guillermo Del Toro. Tout et parfaitement cadré, parfaitement rythmé... Ce film n'est que son deuxième film mais on sent déjà naître le grand faiseur d'images qu'il va devenir avec « L'échine du diable » ou « Le labyrinthe de Pan ».

Guillermo del Toro a souvent renié « Mimic », accusant les producteurs de lui avoir mis des bâtons dans les roues, en lui imposant un budget des plus serrés, et en retravaillant des séquences complètes du script.
C'est d'ailleurs Harvey Weinstein, co-producteur du film, surnommé « Harvey aux mains d'argent » par la profession, qui aurait complètement fait remonter le film et qui aurait imposé cette Happy End d'une débilité déconcertante...
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le 23 mai 2012

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