Je ne sais plus quand est-ce-que j'ai vu Mission Impossible pour la première fois, ni combien de fois je l'ai vu, mais je sais que j'aimais bien ce film étant plus jeune et que je l'ai revu plusieurs fois, chose que je ne fais plus aujourd'hui. Or, dans l'optique de tous les revoir avec la sortie du sixième opus, j'ai donc revu Mission Impossible et je crois que je l'avais pas mal déconsidéré à force dans mes souvenirs. Je me souvenais dans les grandes lignes de l'histoire, des pas mal de scènes, mais ce que j'avais totalement oublié, sans doute car je n'avais pas vu d'autres films de De Palma et que je n'y ai pas prêté attention, c'est la mise en scène.


En fait c'est clairement un film de De Palma. Au départ on assiste à une mission qui est un échec, toute l'équipe est éliminée, sauf Ethan Hunt joué par Tom Cruise. Or dans cette mission on nous impose un point de vue, celui de Hunt la plupart du temps, normal c'est le héros, mais aussi celui que veut bien nous montrer De Palma. Lorsque Jim Phelps court pour échapper à son poursuivant, on ne voit pas ce dernier, il est hors champ... Lorsqu'il se fait tirer dessus, même chose, on ne voit que ce que peut voir Hunt avec ses gadgets, à savoir ce que filment les lunettes caméra que porte Phelps.


Grâce à ça s'en suit tout un jeu de révélations, puisque le point de vue de la caméra fait tout, ne montrant que ce que l'on peut voir au moment où doit le voir... On est baladé par De Palma... Il fait ce qu'il veut de nous... Un peu comme le héros est promené dans Body Double ou Blow Out par ce qu'il voit ou ce qu'il croit avoir vu. Et ça c'est fascinant...


D'ailleurs à l'époque de mon premier visionnage je n'avais pas remarqué à quel point c'était cadré en gros plan, souvent incliné, ce qui fait ressortir une tension, une absence d'échappatoire, je pense notamment au vif échange entre Hunt et son supérieur à Prague.
La tension De Palma connaît et donc forcément lors de la scène culte du film, ce fameux cambriolage des bureaux de la CIA où Tom Cruise joue les équilibristes, si ça n'a peut-être pas la folie de la fin de l'Impasse, ça reste malgré tout maîtrisé au possible, l'absence de musique, le fait que tout puisse faire déclencher l'alarme, le bruit, le toucher, voire même la chaleur corporelle, exacerbe la tension.
Surtout qu'à l'époque ils n'avaient pas encore trop de gadgets ultra sophistiqués, ce qui donne un aspect réaliste à la scène. Si elle n'est pas en temps réel, elle est néanmoins assez longue pour que cette tension ait le temps de naître et de s'intensifier. Bref, c'est clairement l'une des réussites du film.


L'autre réussite est plus thématique, ça serait le passage de relais entre Phelps, issu de la série télé (jamais vu, mais je suppose que les masques et que le fait de reproduire sur un plateau un décor pour faire parler quelqu'un vient de là, d'ailleurs je crois que je n'aime aucune intro d'aucun Mission Impossible et que finalement la plus sympa reste celle du 2... mais j'attends de le revoir avant d'avoir un avis tranché) et Tom Cruise, étoile parmi les étoiles. En outre la quasi ouverture du film et la fin montrent bien ce passage de relais, que maintenant le héros c'est Tom Cruise.
Notons par ailleurs qu'il est appréciable de le voir, au départ du moins, entouré d'une équipe dont il n'est pas le meneur. Il mène par la suite par la force des choses.
En fait l'adage correspond parfaitement ici : « soit tu meurs en héros, soit tu vis assez longtemps pour devenir le méchant ». De Palma arrive ainsi à détruire une idole, celle de la série télé, pour faire briller la nouvelle en la personne de Tom Cruise. Et ça fonctionne d'autant plus qu'en effet, les personnages de la série ont évolué à la période de la guerre froide, forcément la fin de cette ère apporte son lot de changement pour les espions et certains s'en trouvent déstabilisés, en perte de vitesse. On voit d'ailleurs à la télévision un politique demander à ce que les services secrets rendent des comptes, qu'on sache combien ils coûtent au contribuable américain.


Mine de rien, malgré les quelques blagues lancées par Tom Cruise sur le café, le film est assez sérieux et ancré dans son époque, ce que ne seront peut-être pas nécessairement les suites. On n'est pas sur un film d'action, on est encore sur un film d'espionnage. Sauf, à la toute fin, avec cette séquence dans le train qui a été fortement décriée mais qui ne m'a pas forcément choquée. Elle fait office de grosse scène d'action finale, mais je l'ai trouvée étrangement intéressante. En réalité contrairement à plein d'autres films où des mecs marchent sur des trains, ici on voit Hunt plaqué à la paroi du train, s'il se lève il est projeté dans les airs et faire des cabrioles... Le méchant est obligé de se maintenir avec un équipement adapté... Bref on ne se promène pas sur les toits comme on se promène au bord d'une forêt. Malgré le côté délirant de voir un hélico se faire entraîner dans un tunnel on a un côté assez réaliste, où finalement Hunt est super vulnérable, qui est franchement plaisant.


Alors oui la toute fin est peut-être un peu trop, mais ça fonctionne bien avec le côté moins une de la franchise.


Donc je n'ai pas boudé mon plaisir un seul instant et j'espère que le deux qui dans mon souvenir n'était pas si nul qu'on le dit arrivera à m'arracher un ou deux sourires.

Moizi
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le 24 août 2018

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Moizi

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