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Pedro Costa livre avec Ne Change rien (2009) un documentaire sur le travail d’artiste mais bien plus encore. L’œuvre dégage une aura entre réalité et fiction. Le cinéaste portugais filme sans mettre en scène. Il capte. Il saisit des moments, des instants brefs, un geste, un regard. Il y suit la chanteuse Jeanne Balibar ainsi que ses musiciens mais il n’y a pas que cela. Il filme une réalité puisque ce sont de vrais artistes en pleine création tout en inscrivant son œuvre dans la fiction par son travail de réalisateur.


Ne Change rien détone par son aspect expérimental. Un travail en noir et blanc à la fois monumental et envoûtant. Un travail sur les ombres et les lumières, la maîtrise de l’obscurité pour composer parfaitement son cadre. Ce travail de Pedro Costa est juste époustouflant. Une virtuosité dans chaque scène, dans chaque plan jusque dans la mise en avant de tout ce qui peut se jouer hors-champ. Il nous parle de musique mais c’est surtout et avant tout de la poésie. Au détour d’une répétition de chant lyrique, il nous montre que le chant c’est également du sport. Un moment qui nous invite à sourire, un côté comique à voir Jeanne Balibar s’exercer encore et encore. L’intime de la création, l’intime de la répétition, l’intime de cette osmose qui réunit ces artistes, Ne Change rien est un joyaux fascinant mais...


Un « mais » persiste avec Ne Change rien. Si l’œuvre esthétiquement parlant est un chef-d’œuvre, une démonstration du talent qui demeure chez Pedro Costa, elle est aussi difficile d’accès. Tant pour sa forme que son fond. Ce noir et blanc pourrait rebuter. Son approche aussi. Celle d’une mise en scène minimaliste où le cadre se fixe pour voir évoluer ses protagonistes. On pourrait se lasser de ces répétitions musicales où Jeanne Balibar chante, fredonne inlassablement la même phrase, les mêmes mots encore et encore. On pourrait trouver ennuyeux cet ensemble austère où rien ne se passe de frappant et pourtant il s’en passe des choses. Ne Change rien est vraisemblablement une œuvre dure qui peinera à trouver son public, décontenancé sans doute par un tel acte de cinéma.


Ne Change rien est pour moi une poésie couchée sur pellicule. S’il est vrai que cette œuvre reste déroutante surtout aux premiers abords, elle démontre une véritable démarche de cinéaste prenant le temps, celui de s’arrêter et s’inviter à l’intime.

IllitchD
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le 28 août 2012

Modifiée

le 28 août 2012

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