Cette critique fait partie de la liste "John Carpenter: The Prince of Darkness"
https://www.senscritique.com/liste/John_Carpenter_The_Prince_of_Darkness/1608951


Nous sommes en 1976 et le scandale du Watergate est encore dans toutes les mémoires (1972 à 74).
Carpenter s'en inspirera pour la rédaction de son script, via sa vision de son Président.
Une fois rédigé, il le relit posément.


Mais Big John ne s'estimant pas satisfait de son travail, il fait appel à son copain de fac Nick Castle (Myers dans Halloween), qui rajoute un personnage "positif" (Cabbie) et amène la fameuse conclusion au scénario.


Cela fait, Carpenter propose Escape From New York à plusieurs studios, mais deux problèmes se font jour.


D'une part, Big John n'a à son actif que le film d'étudiants gonflé artificiellement sur son C.V (Dark Star) et malgré le succès d'estime, personne n'y voit un réalisateur capable de mener à bien un vrai film professionnel...
D'autre part, la nature même du script en met plusieurs mal à l'aise.
Ainsi dit Carpenter:


"- I wrote the screenplay and no studio wanted to make it, because it was too violent, too scary, too weird".


Big John remisa son script et se lança sur deux autres projets en compagnie des producteurs J.S Kaplan et Joseph Kaufman (via CKK Productions) : Eyes et The Anderson Alamo.
Pour le premier (qui deviendra Eyes of Laura Mars), il laissera tomber et revendra son script à Jon Peters, tandis que le second deviendra le premier film pro de Carpenter, Assault on Precinct 13.


C'est juste après le succès surprise d'Halloween, que Carpenter signera un contrat de deux films avec Avco/Embassy Pictures.
Le premier sera The Fog et le second devait être The Philadelphia Experiment.


Mais Big John se retrouva coincé sur le troisième acte de ce dernier et décida d'abandonner ce projet (The Philadelphia Experiment sera finalement réalisé par Stewart Raffill deux ans plus tard).


A la place, il proposa donc le pitch d'Escape From New York à Avco/Embassy, qui adhérèrent totalement au sujet.


Encore fallait-il trouver l'interprète idéal pour incarner Snake Plissken.
Et ce fut la valse des acteurs:


Carpenter se sentait intéressé de diriger Jeff Bridges et il lui proposa donc le rôle, mais ce dernier refusa poliment.
Big John se tourna alors vers Nick Nolte et se heurta au même refus. Mais Carpenter avait quelqu'un d'autre dans sa ligne de mire, depuis le début...


En 1979, Big John tournait le téléfilm Elvis avec Kurt Russell. De cette collaboration fructueuse -le téléfilm eut une audience record lors de sa première diffusion- Carpenter en retira une grande appréciation et lui proposa alors le rôle de Plissken.
Russell trouva et le projet intéressant et la perspective de retravailler avec Carpenter, comme étant une chose naturelle.
Dans le même temps, le studio émit l'idée d'engager Charles Bronson, mais Big John mit son veto, arguant du fait que Bronson était trop vieux pour le rôle (celui-ci allant sur ses 60 ans).
Avo/Embassy proposa alors Tommy Lee Jones (car réticent à faire reposer le film sur un acteur estampillé Disney), mais le réalisateur n'en démordit pas: ce sera Russell, period !


Russell à bord, Carpenter se tourna vers:
-Ernest Borgnine (dont Cabbie, le personnage créée par Castle s'inspirait),
-Adrienne Barbeau (alors épouse de John Carpenter)
-Tom Atkins ( qui avait tourné l'année précédente dans The Fog) ,
-Season Hubley (épouse de Kurt Russell à l'époque)
-et Donald Pleasence (déjà dans Halloween) le rejoignirent sans tarder.
Isaac Hayes et Harry Dean Stanton (qui retrouvera Carpenter dans Christine) furent ensuite choisi pour compléter le casting.
On notera enfin que la Narratrice et la voix de l'ordinateur, est celle de Jamie Lee Curtis.


Le budget n'étant pas pharaonique (7M$, pourtant le plus gros de la carrière de Big John à l'époque), il fallut donc trouver des alternatives quant à la vision du réalisateur.


Ainsi, les fameux plans présentant New York sous forme de graphiques, furent tournés avec une technique astucieuse.
En effet, devant l'impossibilité financière de s'offrir des effets spéciaux informatiques, il sera décidé de filmer une miniature de New York peinte en noir, sur laquelle tous les angles saillants seront recouvert d'une bande de scotch réfléchissant.
Après un traitement de l'image via un filtre vert, on obtiendra donc les fameuses vues graphiques sur les écrans.


Quant aux nombreuses peintures sur verres (le skyline de Manhattan, entre autre), c'est un certain Jim Cameron qui s'y colle, via New World (filiale SFX de la New World Pictures de Roger Corman), avant de se lancer dans la réalisation de Piranha II: The Spawning...


Qu'en est-il du film?


Eh bien, après cette nouvelle vision, je dois dire que je 'ai plus apprécié que précédemment !
J'ai toujours adoré Snake Plissken mais je trouvais le film trop...ou alors pas assez...


Bref, il m'est apparu sous un nouveau jour...
Carpenter nous décrit donc un futur sombre et totalitaire (l'un va avec l'autre, quoiqu'il en soit).
Les libertés ont fondus comme neige au soleil et...


En fait, Plissken est amené à Liberty Island (soit l'ilot où se trouve la fameuse Statue) qui représente donc (pour nous, spectateurs) la répression, la déportation, l'endoctrinement, la pensée unique, la tyrannie et j'en passe...
Liberty Island est donc le lieu désignant la dernière "porte" menant à la prison de Manhattan (qui est donc une île).
Cette prison est paradoxalement le seul endroit dans le pays (voire le monde) où ses pensionnaires peuvent agir à leurs gré, c'est donc l'ultime terre de liberté !


Du coup, le terme Liberty Island semble éminemment ironique, puisqu'il désigne la fameuse île-prison...


A côté de ça, les habitants de cet univers carcéral à ciel ouvert, vivent comme ils le peuvent et certains ont même recours au cannibalisme quand les rations mensuelles (livrées par hélicoptère) viennent à manquer.


C'est donc dans ce magnifique endroit que l'avion présidentiel s'écrase (détourné par une faction dite terroriste, l'appareil s'écrase contre une tour...remember**WTC 911**) et que l'exécutif du pouvoir (Donald Pleasence) se retrouve bien démuni, quand le Duke (Isaac Hayes) devient verni...


Après une tentative de mission de sauvetage qui échoue, le Commissaire Hauk (Lee Van Cleef) n'a d'autre choix que d'envoyer un condamné pour aller le récupérer.
C'est donc S.D "Snake" Plissken qui va s'y coller.


Hauk lui propose un marché très simple: Plissken (call me Snake...) le ramène en vie et en échange, son passé criminel sera effacé.
Et pour être sûr que Plissken (call me Snake...) n'en profite pas pour se faire la belle, Hauk lui injecte des micro-explosifs.
Snake (the name's Plissken...) n'ayant plus le choix, il ira effectuer cette mission...


Carpenter a su trouver en Kurt Russell son "double" parfait.
En effet, Plissken est un gars qui n'a qu'un objectif dans la vie: profitez pleinement de la prochaine minute. Et si possible, avec quelques biftons dans les poches.
Le reste est secondaire..


Ainsi, il n'interviendra pas pour sauver une jeune fille d'un viol pas plus qu'il ne donnera satisfaction au pouvoir en place, lorsqu'il détruira la fameuse cassette audio contenant la description d'une nouvelle arme inédite, susceptible de mettre au pas les deux autres superpuissance (soit la Chine et l'URSS).


Russell dira s'être inspiré principalement de l'Homme sans Nom interprété par Eastwood (dans la trilogie de Leone) et il amènera aussi le fameux bandeau sur l’œil, pour démarquer encore plus son personnage.


Il est heureux que Carpenter ait décidé de couper du montage, la scène d'introduction de Plissken où celui-ci se faisait arrêter après la tentative de braquage de la Réserve Fédérale.
En effet, son apparition telle qu'on la connait est bien plus efficace, car mystérieuse et iconique à la fois.


Sorte de prémisse aux futurs jeux vidéos de plateformes (le héros doit passer ici et là et se battre avec des Boss), Escape From New York est un film ironique qui tacle bien comme il faut les dérives des politiciens (le Président en tête) ainsi que celles sur la sécurité à tous prix (à une époque où l'arrondissement du South Bronx de New York est désigné comme l'endroit le plus pauvre et le moins sécuritaire des USA)....


En effet, le Président est humilié de longue: cible de tirs, moqueries diverses et affront suprême, il est affublé d'une ridicule perruque blonde (une idée spontanée de Pleasence sur le tournage), achevant de le réduire à un pantin risible.
Le Président se vengera en abattant de sang-froid le Duke ("You're the Duke, uh? You're number one, uh?)...


Snake retrouvera sa liberté sans se départir de sa Fuck You attitude et laissera le monde se débrouiller pour enfin trouver une paix durable.


Hauk:
"-You going to kill me, Snake?


Plissken:
Not now, I'm too tired...Maybe later."

Créée

le 23 févr. 2017

Critique lue 574 fois

16 j'aime

4 commentaires

The Lizard King

Écrit par

Critique lue 574 fois

16
4

D'autres avis sur New York 1997

New York 1997
Prodigy
5

Critique de New York 1997 par Prodigy

A revoir New York 1997 je comprends mieux pourquoi il vieillissait si mal dans ma mémoire, pourquoi je le regardais si peu souvent comparé à d'autres films de son auteur que j'ai vus 50 fois, et...

le 10 juil. 2010

98 j'aime

13

New York 1997
Ze_Big_Nowhere
8

Mon New York

New York ! Capitale du crime. Haut-lieu de la came et paradis de la péripatétipute en tout genres. Des buildings claustrophiques qui jouent à cache-cache avec le soleil et qui gagnent toujours. Des...

le 21 janv. 2015

88 j'aime

15

New York 1997
Grimault_
7

T'es solide, Snake !

En 1981, un an après The Fog (et quelques années après son cultissime Halloween), John Carpenter commence à sérieusement maîtriser le genre du thriller « à ambiance », travaillant des rythmes lents...

le 18 sept. 2020

47 j'aime

2

Du même critique

Halloween Kills
Franck_Plissken
8

Reflect: The Shape on Myers

Après le succès du H40 (2018), le duo Green /McBride se mirent à l'écriture du chapitre suivant dans l'optique de filmer Halloween Kills et Halloween Ends à la suite, pour économiser les coûts. Mais...

le 15 oct. 2021

34 j'aime

24

Get Out
Franck_Plissken
8

Puppet Masters

Impressionnant... Œuvre maitrisée avec un excellent Daniel Kaluuya sous l’œil avisé de Jordan Peele, Get Out nous plonge très rapidement dans un malaise diffus et ce, dès lors que le couple...

le 11 mai 2017

33 j'aime

22