N'est pas Kourtrajmé qui veut

J'aurais pu mettre 2/10 à ce truc pour plusieurs raisons : une réalisation épileptique, un montage hystérique à la Jean-Marie Poiré sous amphètes, des dialogues de collégiens, un personnage principal totalement insupportable (mytho, cupide, casse-couilles, ingrat, stupide... sa seule qualité est de savoir casser des gueules apparemment), sans parler du titre qui n'a pas grand chose à voir avec l'histoire et semble surtout démontrer un certain mépris pour ceux qui n'ont pas eu la chance de naitre avec une cuillère en or pour y foutre leur coke. Le film tente, comme "En passant pécho", le précédent méfait de son auteur, de jouer à fond sur le style "jeune" et "ghetto" en poussant à fond les potards sur l'argot, la vulgarité, la violence gratuite et l'humour débile.

Mais Julien Royal (fils de Ségolène et François, ce qui ne l'empêche a priori pas d'avoir du talent) n'arrive pas à la cheville de Kim Chapiron, encore moins de Romain Gavras, et semble même galérer à atteindre le niveau de celui qui semble être son modèle absolu : Franck Gastambide (et là ça devient chaud).

Difficile de tenir devant ce déluge de mauvais goût et de n'importe quoi mal foutu, rempli de guests qui auraient sans doute mieux fait de choper la crève le jour du tournage de leur scène (Pauvre Adèle Exarchopoulos qui met fin à une série d'excellents choix de rôles avec son caméo cliché à souhait). Ce sera d'autant plus difficile pour les personnes de plus de 40 ans, les allergiques au langage dit "de quartier" et, bien sûr, les épileptiques.

Mais alors pourquoi je l'ai noté 5/10 ???

Et bah en fait il y a quand même des trucs à sauver dans ce machin monstrueux.

Et principalement son duo d'acteurs principaux : Nassim Lyes (vu dans Farang, Made in France, 16 ans ou les excellentes séries Lascars et The Spy) et Zoé Marchal (fille d'Olivier et vue dans... rien du tout pour ma part) sauvent le film tant bien que mal grâce à leurs interprétations incontestablement originales et leurs présences complémentaires. Si le premier est en roue libre totale, prêtant son énergie, ses mimiques grimaçantes et son corps d'athlète à un personnage de connard absolu, la seconde dénote par un mélange entre sobriété et grain de folie qui la rende immédiatement sympathique, probablement par contraste avec son acolyte.

Et le virage final, transformant in extremis cette comédie d'action surexcitée et immorale en comédie romantique, fonctionne étrangement.

L'autre point fort de la chose (oui désolé j'ai encore du mal à qualifier ça de film), c'est l'action. Profitant des aptitudes martiales de son acteur principal, et sans doute d'excellentes doublures cascades et d'effets numériques, Julien Royal nous offre de surprenantes bastons en prises de vues quasi-subjectives, extrêmement immersives, à la violence jouissive. Bon, contrairement à ce que j'ai pu lire sur d'autres critiques, ça n'égale pas les productions américaines à la Tyler Rake ou John Wick (faut pas déconner) mais l'effet de surprise et le soin apporté à ces scènes fait plaisir à voir. Même si le surdécoupage de certaines séquences donne le tournis et les rendent difficilement lisibles (surtout si, pour se mettre dans le bon état pour apprécier cette "œuvre" on a ingéré quelques substances psychoactives).

Au final, et après quelques jours de digestion, je mets donc la moyenne. Je crois d'ailleurs que j'avais donné la même note à "En passant pécho" pour le même genre de raisons. Mais je précise que, malgré mon grand âge, je suis, à la base, totalement la cible pour ce genre de conneries destiné aux amateurs de rap, de baston et d'humour débile. Donc 5/10 signifie quand même qu'avec un peu plus de talent derrière la caméra et le scénario, on aurait pu avoir un bon film. Ou au moins un truc vraiment drôle et potentiellement culte (je veux dire vraiment culte, pas uniquement pour les quelques ados et post-ados qui vont se branler sur ce truc et ressortir deux-trois répliques à l'occasion avant de l'oublier rapidement).

Pour conclure avec une vanne aussi subtile que celles de Youssef Bouahzizi : Julien Royal a sûrement autant de talent pour le cinéma que Pierre Sarkozy pour la musique. Et puis c'est toujours mieux qu'il fasse de l'audiovisuel plutôt que de la politique comme ses parents. Avec sa tête là !