Entre nous, très sincèrement, j'aurai vraiment voulu l'aimer celui-là ! Ça m'aurait permis de me prouver que je n'étais pas d'une mauvaise fois crasse et tenace tout en montrant que je savais reconnaître l'exception. En l'occurrence, l'exception, c'eut été un bon film de De Palma.

Constat d'autant plus rageant que c'était pour moi une des dernières occasions d'en voir un potable, de la filmo du barbu, puisque faisant non seulement parti de sa première moitié de carrière mais en plus étant considéré comme un de ses grands films (« LE chef d'œuvre de De Palma » ose même la jaquette).
Mais non, ce n'est pas possible. Je ne sais pas comment vous faites.


Le nanard et la manière


Je n'ai pas envie d'en faire des tonnes, je vais donc tâcher de synthétiser. On va s'attacher au fond (ha ha !) et la forme.
La forme, c'est le plus simple puisque Brian utilise peu ou prou toujours les mêmes artifices depuis 40 ans, toujours aussi pénibles, appuyés et démonstratifs : la caméra qui tourne indéfiniment autour des personnages : check ! Le ralenti grotesque avec arrière plan sidérant d'incohérence (ici les néons qui clignotent tout à coup alors que le héros court vers l'héroïne) : check. Les zooms accompagné du philarmonique pour indiquer que «attention, ceci est déterminant»: check.


Le cinéma pour les nuls


Car c'est bien ce qui me dérange autant dans le cinéma de Brian, comme celui de son modèle Alfred (que je classe effectivement dans une seule et même pénible catégorie): même pendant les moments neutres voir intéressant de ses films, on reste invariablement sur des rails contraignants dont il est impossible de s'extraire et qui rendent l'expérience gênante.

On dirait que De Palma s'adresse à son public comme s'il était au mieux inculte ou au pire débile.

Rien, jamais, ne sort du chemin tracé en début d'histoire. Rien ne nous emmène jamais ailleurs. Ce que j'aime dans un polar réussi est sa capacité à nous apprendre quelque chose d'un milieu, d'un métier, d'un quartier, ce sont ces moments aux côtés de l'histoire qui nous embarque doucement vers des rivages inédits, même le temps d'une scène.
Ici, rien de tout ça. En permanence, l'impression d'avoir le regard parasité par une grosse lumière rouge qui clignote sans interruption et qui nous dit : «attention, polar psychologique, toutes les scènes servent le twist final, que vous allez voir ce que vous allez voir». Tout est appuyé, lourdement, de la musique aux cadrages en passant par l'histoire ou les acteurs.
Alors si en plus, vous avez le malheur de vous dire dès la première scène : ça ne peut être que lui le méchant... Il ne reste plus grand-chose.

Je sais que ce que je reproche à Brian et Alfred est valable pour bien d'autres de leurs collègues, qui ont officié avant et après eux (je pense notamment à Fincher pour qui j'ai une inclinaison coupable, alors qu'il est de bon ton, quand on est cinéphile branchouille, de le conchier avec rigueur et application) mais ce sont les seuls dont j'ai toujours entendu dire qu'ils étaient des génies, des maîtres, ce genre de fadaises que je ne supporte plus depuis des lustres.

Ce ne sont au mieux que d'honnêtes tâcherons dont le seul talent a toujours été de savoir jeter de la poudre aux yeux du plus grand nombre. Que certains parmi vous, amis lecteurs au regard d'ordinaire si lucide, continuent à aimer se laisser saupoudrer les rétines depuis tant d'années me laisse stupéfait. En fait de poudre, c'est un gros plâtre épais et industriel.
Il a peut-être pris quand vous étiez petit.
guyness

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