Ordure est aussi agréable qu'un type intelligent qui vous crie dans l'oreille au milieu d'une boite de nuit. Ce n'est pas tant qu'il n'ait rien à dire (il y a même quelques séquences efficaces dans leur vulgarité, comme le concours de photocopies de bites, ou la petite auto-destruction finale), mais que son style est d'une lourdeur pachydermique. C'est une photocopie totale du style de Danny Boyle visuellement parlant (on ne s'étonne pas d'ailleurs d'apprendre que son scénariste a travaillé sur Trainspotting, qu'il faudra que je revois pour confirmer mon opinion sur le cinéaste). Dans les couleurs flashies, les excentricités de carnaval et les gags pensés pour être cultes. On vanne les efféminés en se moquant de la médiocrité de leur homosexualité, on vanne le collègue sur sa petite bite alors qu'on en a pas une bien plus grande... Ca c'est la méchanceté culte érigée par le film. Mais tout cela sonne creux, sature sans garantir un intérêt au delà du petit divertissement complaisant. Les personnages sont traités avec une légèreté assumée, puis le film essaye de combler le vide avec le pétage de câble progressif de son personnage principal en espérant alors réussir à lui donner de la profondeur. Mais il ne parvient jamais à s'affranchir de cette harassante agressivité de style, qui sonne aussi creux que son début (la présentation des personnages, l'interrogatoire du camé...). La performance de McAvoy est elle aussi à cette image. Oui, performance d'acteur, dans une sorte de cabotinage qui alterne entre le blasé et l'hystérique selon l'humour de la séquence, dont l'absence totale de stabilité émotionnelle laisse le spectateur complètement indifférent à ses état d'âme, à moins bien sûr de prendre le tout comme un simple divertissement un peu grinçant, totalement stérile mais avec quelques moments de noirceur. La banalisation de la méchanceté est un peu à ce prix, et finalement, Ordure a autant d'intérêt qu'un American Bluff, d'un épuisement lassant dans ce ton de bourreau morose qui trouve un dernier soupçon de vie en empoisonnant celle des autres, si possible en tapant sous la ceinture. On pourrait se réjouir de ces mauvaises blagues, mais le style m'en a complètement empêché. Le film se ramasse une sortie en DTV et certains crient au scandale. Mouais, le locataire de Polanski n'avait pas forcément besoin d'un relooking électro. Jan Kounen et ses lubies de mauvais goût ont, elles, un air de jamais vu.
Voracinéphile
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le 9 déc. 2014

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