Oh, t'es lourd !
... s'écrie en substance Brita à son ex-mari Tony, qui devient invivable par excès de jalousie. Il faut dire que ce dernier, grand acteur de théâtre, s'identifie habituellement trop à ses rôles. Et...
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le 9 mai 2012
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Ce film (dont le titre français n'est pas beaucoup plus heureux que l'original) souffre d'un très gros déséquilibre : la mise en place dure pas moins de cinquante minutes --- avant que Tony-Othello soit possédé par son personnage et commence à partir en vrille --- et il ne reste ensuite plus que cinquante autres minutes pour développer et dénouer l'essentiel de l'intrigue.
Lors de cette première et très poussive partie (cf. les rires forcés du public vers la 10e minute), un des éléments pourtant déterminant du récit n'est même pas amené de manière crédible : la rencontre avec la serveuse (rentre-dedans opéré par une Shelley Winters étonnamment sexy).
Il fallait à tout prix coller une demoiselle dans les bras de notre sinoque en devenir et c'est donc aux forceps que les scénaristes s'y sont pris.
Hors de question en effet que Tony-Othello donne le baiser de la mort à Brita-Desdémone, son ancienne épouse ; celle qui le recevra doit être une autre pour laquelle l'assassin sera censé éprouver de la jalousie ; là aussi, ça sent la bricole...
La première de la représentation d'Othello (point d'orgue) dure ensuite douze longues minutes, histoire de bien nous visser au fond de la calebasse que l'assassinat virtuel de Desdémone va laisser de douloureuses traces sur la santé mentale du pauvre Tony.
Il commence à perdre la boule pendant le cocktail, le soir même ! ... UNE seule représentation et c'est déjà Moruroa dans la citrouille !!
La précipitation des événements est ensuite risible : hébétude, hallucinations, faute, oubli, puis de nouveau du bricolage, des fils blancs, un pugilat épouvantable, un traquenard (pour confondre le suspect)...
On se demande ce que le grand George Cukor a voulu montrer avec ce travail somme tout ambitieux.
Si c'est une réflexion sur le métier d'acteur et l'emprise des personnages incarnés, c'est mauvais.
Si c'est un thriller ou un film noir --- A Double Life est listé/cité dans le Film Noir Guide, dans l'Encyclopedia of Film Noir, dans Philosophy, Black Film, Film Noir, dans What is Film Noir... --- sur fond d'atmosphère broadwayienne, ça l'est encore plus (mauvais).
Soyons indulgent ; si c'est une visite de Broadway (avec un vague polard comme fil rouge), là, c'est plutôt réussi ; on découvre les coulisses, les intervenants, les tractations, les sautes d'humeur...
Nonobstant un scénario définitivement foireux, dans tous les cas, la mise en scène du réalisateur de Madame porte la culotte reste fluide, élégante, inspirée.
Ronald Colman (Horizons perdus de Capra), qui récupère un rôle d'abord prévu pour Laurence Olivier --- "The script was originally meant for Laurence Olivier" ; George Cukor, A Double Life, p. 194 --- ne s'en sort pas trop mal (la scène finale est relativement poignante).
Il obtiendra même la consécration (meilleur acteur) lors de la 20e cérémonie des Oscars...
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le 29 mai 2021
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