Le cinéma coréen a de la chance. Il nous propose en ce moment plusieurs metteurs en scène majeurs avec en tête Bong Joon-ho. Tous les pays ne peuvent pas en dire autant...
L’histoire de ce Parasite est universelle. Les pauvres, surtout ceux qui n’ont pas accès au Wi-Fi, ont toujours rêvé d’arnaquer les riches. Le parasitisme est, avec la compétition, l’une des formes de relations humaines parmi les plus répandues. Il arrive même parfois qu’un parasite soit lui-même victime d’autres parasites... D’après ce qui me reste de mes études de biologie toute interaction entre deux organismes différents se décompose, en schématisant,soit en mutualisme (avec bénéfice pour les deux parties), soit en commensalisme (où l'hôte fournit une partie de sa propre nourriture au commensal) soit en parasitisme (qui est proche de la prédation). Dans le cas de la cohabitation sociale du début du film on serait d’ailleurs plus proche du mutualisme que du parasitisme puisque les pauvres fournissent un travail en échange d’un salaire octroyé par les riches.
Mais le titre est néanmoins bien choisi car comme dans le cas du plasmodium, le parasite responsable du paludisme il y a multiplication (ici par 4) de la cellule hôte (les Kim) dans l’organisme parasité (la demeure des Park, les riches).
Mon long préambule ne reflète pas bien sûr l’empathie du metteur en scène pour la famille de Ki-Taek qui apparaît comme une famille unie et aimante, des escrocs certes mais contraints à l’arnaque par leur situation de très grande précarité. L’opinion favorable du spectateur commence cependant à fléchir à partir du moment où le fils de Ki-Taek intrigue pour provoquer le licenciement de la vieille gouvernante si dévouée à la famille.
Pour en finir avec le parasitisme, et c’est là l’autre leçon du film selon Bong Joon-ho , c’est le même type de relation qui intervient chez les très riches, une famille d’assistés certes sympathiques mais incapables de faire la cuisine ou la lessive sans l’aide d’une gouvernante, incapables d’éduquer leurs enfants sans précepteur et donc obligés de parasiter une famille pauvre.
Parasite pose en même temps la question de la propriété. Est-ce que tout le monde n’a pas les mêmes droits d’occuper cette maison d’architecte? Les occupants oisifs comme leurs employés qui travaillent? Ou pour aller plus loin les araignées, les fourmis, les moustiques n’ont-ils pas eux aussi le même droit d’y vivre ? Les occupants finissent bien d'ailleurs par trouver un modus vivendi et dans la plupart des films il y aurait eu l'exploitation de la bluette sentimentale entre le fils de Ki-Taek et la fille Park.
Tout irait donc presque pour le mieux dans cette comédie sociale sans le facteur X qui intervient à la moitié du film à l’occasion d’un orage, comme si l’eau était propice à l’attaque nocturne des vecteurs du parasite. Parasite bascule alors dans l’horreur finale, ce qui n’est pas étonnant de la part du metteur en scène de The Host ou Memories of Murder , une horreur qui personnellement est conforme à ce que j’attendais (je pensais à un monstre assoiffé de sang tapi quelque part). On a donc droit au final à une grosse dose d’hémoglobine, mais c’est tellement énorme que l’on soupçonne que ce qui a dû le plus amuser Bong Joon Ho est bien le tournage de cette dernière partie.