Après une entrée en matière un peu laborieuse, sautant à pieds joints dans l'exposition d'un projet de tour en bateau effectué par trois anciens copains, à présent quinquagénaires et diversement célibataires ou mariés, le film prend son rythme de croisière et nous entraîne dans le sillage de ces trois amis, dont aucun ne sait véritablement manœuvrer, pas plus un bateau que son existence.
Deux belles sirènes ne tardant pas à monter à bord de l'élégant voilier acquis par l'homme marié de l'équipe, le bal des illusions se met rapidement en place, permettant au film de dévoiler sa face la plus sensible et la plus subtile : aux clichés sur l'homme mûrissant, la vie de couple tiédissante, le célibataire hypochondriaque et le célibataire encore charmeur, ne se reconnaissant pas en "homme mûr", se mêlent de réels moments de fraîcheur et de justesse, entre rire moqueur et identification attendrie, autour des rêves toujours prêts à prendre leur essor, des questionnements entourant le non-dit dans un échange de regard, une parole ou un frôlement. Entre le clan féminin, rapidement trio, et le clan masculin, un équilibre numéral est atteint, proscrivant toute rivalité, si bien que chacun semble constamment tâter le terrain de l'autre, alors même que le sien propre n'est pas si clair ni si déterminé que cela. C'est dans cette quête constante de l'autre, cette interrogation sur ce qui peut s'envisager ou simplement se rêver à deux que réside la vraie délicatesse du film, comme si chacun préférait ausculter l'autre plutôt que lui-même et s'y sauver...
La captation de ces rêves et de ces vrais et faux-semblants dansant sur les reflets de l'eau confère à ce premier long métrage de Bernard Tanguy un charme un peu nostalgique qui convainc de porter un regard indulgent sur les quelques points plus appuyés de cette "Parenthèse" aquatique.