Paterson, c’est l’archétype par excellence du film qui rentre dans la catégorie des "losers magnifiques". Ces losers à la vie simple mais qui sont tellement attachants et auxquels on s'identifie facilement.


Au-delà de ça, c'est évidemment extrêmement lent du début à la fin, sans qu'on ait grand chose à se mettre sous la dent. Jarmusch divise son film en sept journées, inlassablement répétées.


Adam Driver joue un conducteur de bus, poète pendant ses temps libres. Ses poèmes reviennent constamment, écrits à l'écran et, en bon loser, ne reflètent pas grand chose d'intéressant. Ca conduit je dois dire à une excellente scène, où il se rend compte qu'une petite fille écrit mieux que lui. La loose jusqu'au bout. Ce poème déclamé par la petite fille, et le seul écrit par Jarmusch lui-même, est de loin le plus beau du film. Il aurait dû peut-être se faire plus confiance parce que tous les autres, écrits par un certain Ron Padgett, ne sont pas à la hauteur et sont eux aussi plusieurs fois répétés.


En résumé, c'est Inside Llewyn Davis sans la musique, sans la poésie et sans la magie des frères Coen. C'est la célébration de la quiétude, de la vie calme sans drame, sans tension. Agréable et relaxant en quelque sorte, mais le film ne propose aucune évolution. C'est une peinture des choix de vie qu'on répète chaque jour, en fonçant les yeux fermés dans des murs invisibles, en s'enfermant dans des routines desquelles on prétend se satisfaire.


Trop fantomatique pour que j'en fasse les louanges, trop inoffensif pour que je l’incendie. Il n’est pas non plus assez ambitieux dans l’humour, la plupart des moments comiques provenant des réactions sonores du chien.


L’appréciation de la poésie est somme toute assez subjective et chacun y percevra quelque chose de différent. On pourra trouver par exemple une certaine beauté à la répétition ou à la singularité pure. Personnellement, j’en aurai rien retiré si ce n'est la prestation subtile mais généreuse d'Adam Driver, quelques beaux plans, la réunion des deux héros de Moonrise Kingdom, et le fait que la troisième génération est aussi respectueuse au ciné que des ados pré-pubères à l’avant-première du nouveau Paranormal Activity.

Peaky
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le 10 déc. 2016

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Peaky

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