La transgression mais aussi l’analyse psychologique implacable

Si Anne Fontaine a réussi un film aussi fracassant, elle le doit certainement à la tonalité du livre original de Doris Lessing qu’elle adapte ici.Il n’empêche que la réalisatrice sait comment décrire les émotions contradictoires de ces deux amies proches tombant amoureux du fils de l’autre.Ce constat faisant jaillir la transgression même interroge sur l’origine de leurs sentiments.Dès le départ, on sent que Lil et Rose ne sont pas épanouies dans leur mariage et que leur maternité est une façon de compenser cet état de fait.Quelque part, le fait de tout partager très tôt dans ce cadre idyllique australien, conditionne leurs fils à un genre de séduction qu’ils mettront en pratique et chacun à leur manière.Les rôles de mère de Rose et Lil ne sont pas à critiquer, mais leurs façons de devenir les maîtresses du fils de l’autre convoquent une analyse psychologique implacable.Anne Fontaine,loin de condamner ces deux amies perdues et tourmentées devant cohabiter avec leurs désirs de femmes encore séduisantes, déroule Perfect mothers dans des non-dits habiles pour ne poser qu’une seule question: qu’est ce qui a fait déraper ces deux femmes et leurs deux fils? La réponse des carences affectives, du choix du mari de Rose de s’investir dans un poste universitaire sont des circonstances n’expliquant pas tout. Le refoulement d’un désir s’invite également. La réaction du fils de Rose quand il la surprend avec celui de Lil, tout ce que ce dernier entreprendra malgré son mariage et ses enfants, est aussi trés déstabilisant et dérangeant.La multiplicité des postulats de l’intrigue prouve qu’il n’ y a pas de réels coupables à part qu’une mère et son amant n’ont pu empêcher leur désir malgré toutes les évolutions dans leurs vies.Les taxer tous deux de faiblesse serait trop facile car on peut aussi les voir comme un couple particulier assumant un amour « limite »malgré la morale et les conventions.Alors, oui, le spectateur observe les mouvements exaltés/dépressifs parfois de ces deux hommes/fils et de ces deux femmes/mères et se dire à l’ultime plan que leurs choix de vie en dehors de leurs sphères les conditionne à la déception et à l’échec.C’est une claque comme Anne Fontaine sait les asséner depuis Nettoyage à sec ( un tournant dans sa riche filmographie).En soulevant des questions, en esquissant des réponses mais en refermant le film sur une impasse logique et sans concessions.Perfect mothers, de par sa maîtrise absolue, vous laisse avec une montagne de questions comme disait Alain Bashung et celui qui aurait une seule réponse définitive n’y aurait rien compris.

Specliseur
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Un film en 2019

Créée

le 5 mars 2019

Critique lue 528 fois

Specliseur

Écrit par

Critique lue 528 fois

D'autres avis sur Perfect Mothers

Perfect Mothers
Queenie
9

Paradis Perdu.

Deux amies d'enfance, très proches l'une de l'autre. Deux mères de deux superbes jeunes hommes. Un petit coin paradisiaque d'Australie. Les choses basculent (mais pas tant que ça) lorsque chacune des...

le 5 avr. 2013

35 j'aime

2

Perfect Mothers
Rawi
4

Critique de Perfect Mothers par Rawi

Comment "Les grands-mères" ont pu devenir "The perfect mothers" ? Franchement le pitch de ce film est effrayant ! non pas par le côté cougar qui couchent avec des minets mais par le côté "je prends...

Par

le 18 août 2013

28 j'aime

3

Perfect Mothers
amarie
3

Critique de Perfect Mothers par amarie

Vraiment pas crédible cette histoire, les 2 meilleures amies qui tombent amoureuses de leurs fils respectifs, perturbant à peine leur amitié ; un tout petit peu quand même faut pas charrier ; les...

le 18 mars 2014

23 j'aime

4

Du même critique

Eiffel
Specliseur
8

Un biopic alternatif remarquable

Ce qui marque d’entrée dans Eiffel est la qualité des scènes d’époque du côté de Bordeaux où de Paris. Martin Bourboulon effectue une mise en scène épatante où chaque détail compte. Les extérieurs de...

le 13 oct. 2021

40 j'aime

Paddington
Specliseur
7

Un petit ours débonnaire dans un film drôle et optimiste

Je comprends mieux pourquoi nos voisins britanniques ont une affection si particulière pour Paddington.Ce petit ours péruvien et déraciné qui débarque à Londres a déjà un regard naïf mais pas tant...

le 14 déc. 2014

25 j'aime

3

Les Frères Sisters
Specliseur
5

Le western: pas un background pour Jacques Audiard

Quand j’ai lu,comme beaucoup de monde,que les Frères Sisters était une proposition de John C Reilly au réalisateur,j’ai commencé à avoir quelques doutes sur la nature de ce film pas véritablement...

le 20 sept. 2018

19 j'aime