Je ne me souviens plus la dernière fois que j'ai aimé voir un film de Jésus Franco. Je m'attendais à retrouver ce petit plaisir interdit et malheureusement, je ne suis pas loin de m'être bien fait chier. Pas totalement cependant, sûrement parce que le propos sadien a de quoi tenir éveiller.

Surtout, la plongée dans un univers très daté, dans une époque, les années 70 qui semblent avoir été éternuées sur les murs : le grand manoir fait rêver, les meubles et la décoration font sourire, mais les fringues extravagantes hippy hip hourra disco style allongent les futes, les tissus panthère font grouaarrr. Le film offre un spectaculaire festival du goût outrancier des années 70. Avec le dénudé putassier ou ingénu de ces demoiselles, le film s'inscrit bien dans son époque et dans son genre érotique, porno chic à la Dorcel.

Et la réalisation de Franco, chaotique parfois, troublée souvent, offre un contraste saisissant avec cette image. On comprend avec certains plans flous ou une caméra un peu trop brinquebalante que le style bourgeois peut à tout moment virer rebelle.

Ils ne s'en prive pas, c'est toute l'histoire du film : un couple de riches bourgeois oisifs se payant de temps en temps une fille pour en faire un jouet sexuel. La cave du manoir contient les reliques de ces perversions révélant la fesse cachée du couple.

À ce propos, c'est dans cette cave que le travail photographique de Gérard Brisseau se remarque le plus avec des couleurs criardes, horrifiques. C'est que dans le désordre apparent que Franco met parfois dans son film, une certaine tenue formelle est décelable. Malheureusement, cette maîtrise ne s'étend pas au-delà de l'image.

Le scénario tiré de « La philosophie du boudoir », si je ne m'abuse, ne peut s'imposer réellement, faute de personnages bien consistants. Je crois bien que la plus grande déficience vient des dialogues, parmi les plus creux qui soient. Rarement on aura écrit aussi fade.

Ajoutez à cela des acteurs relativement moyens et vous aurez de fortes chances de vous ennuyer. Le pire est sans doute Robert Woods dont l'éclat est à ce point faiblard qu'on se demande s'il existe. Alice Arno n'est pas beaucoup plus à son avantage. Il y a chez elle quelque chose de dur qui correspond cependant très bien son personnage. Sans doute dans la forme de son visage, ses sourcils, sa tête carrée, je ne sais pas trop.Lina Romay joue l'imbécile en gardant un visage ahuri en continu. À la longue, on se lasse. Seul Alfred Baillou avec son physique déformé et son visage torturé sort un peu de l'ordinaire, éveillant curiosité et fascination.

Rien de bien folichon à se mettre sous la rétine. D'autant plus que les scènes érotiques sont tout aussi mauvaises que les dialogues. Sans aucune sensualité, jouées en dépit du bon sens, jamais vraiment crédibles, chargées d'artificialité dans les gestes et les mouvements, elles sont en plus plombées par une longueur systématiquement rédhibitoire.

Bref, à part les décors et le style seventies rigolos, je n'ai pas su apprécier ce petit film.
Alligator
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le 10 sept. 2013

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