Prise de conscience et recherche de repères.

"Platoon" est un film américain écrit et réalisé par Olivier Stone en 1986 et couronné de l'Oscar du meilleur film. 1er volet d'une trilogie consacré à la guerre du Viet-Nam, c'est son film le plus abouti et le plus côté de sa filmographie.

Nous suivons l'histoire d'un jeune homme issu d'un milieu plutôt favorisé, Chris Taylor, qui décide de s'engager volontairement dans la guerre du Viet-Nam en 1967, au grand dam de ses parents, qui lui déconseille très fortement. Il est pétri de grands idéaux et n'a qu'une ambition : servir son pays au même titre que ses ancêtres comme son grand-père. Il est affecté à la 25ème division d'infanterie et va vite déchanter. Dès les premiers jours, il effectue d'interminables patrouilles jour et nuit dans la forêt et doit creuser des trous servant comme position de défense. Sa fatigue physique est conséquente et il se demande bien comment il va pouvoir tenir le coup. Il comprendra que cette épisode de sa vie sera une tragique et terrible épreuve qu'il va devoir endurer.

Quand il arrive, on le sent perdu. C'est un nouveau donc on ne prête pas attention à lui considérant que son expérience pourrait le faire mourir vite et il souffrirait donc moins. Plus tard, on lui rira au nez quand certains apprendront qu'il était volontaire pour cette guerre. Il est naïf, désemparé et doit donc apprendre seul et se chercher des repères dans un monde nouveau. Dans sa division, un conflit oppose 2 sergents : le sergent Barnes et le sergent Elyas. A son arrivée, il est naturellement impressionné par le sergent Barnes, un homme dur qui symbolise la force brute, une machine de guerre courageux et cruel. Chris retrouve en lui le patriotisme et la motivation pour lequel il s'est engagé. Le sergent Elyas est son parfait opposé. C'est un homme moral qui veut rester humain et juste même si l'ennemi est cruel. Ces 2 sergents représentent pour lui 2 figures paternelles et il ne sait choisir laquelle. Avec la guerre, tout se trouble dans sa tête, il ne connaît plus la moralité et ne sait pas qu'est-ce qui est bien ou mal. Mais peu à peu, il changera de position avec les cruautés et injustices de la guerre pour finalement choisir le sergent Elyas plus humain. Ce personnage représente d'ailleurs une figure christique tout au long du film.
A un second niveau, les 2 sergents symbolisent une Amérique scindée en 2. D'un côté, le sergent Barnes qui représente ce qui veulent à tout prix gagner la guerre quitte à sacrifier un nombre conséquent de vies. De l'autre, le sergent Elyas qui représente les plus lucides. Ceux qui pensent que le conflit est perdu d'avance et que l'Amérique y perd son âme. Tout au long du film persiste cette tension de troupes divisées dans le camp américain. Une sorte de petite guerre civile. Mais comme le dit très bien Chris : " L'ennemi n'est pas les autres, l'ennemi c'est nous-même".

Le film ne se garde pas de montrer les aspects les plus terribles et dérangeants de cette guerre. En effet, la plupart de ces soldats sont des gens du peuple et de basse sociale. On nous dépeint des soldats épuisés physiquement. Des soldats peu concernés par le conflit et s'exprimant dans un langage grossier. Des soldats engagés dans une guerre qu'ils ne comprennent pas. Des soldats qui se droguent pour oublier. Mais surtout des soldats sur les nerfs constamment à la limite du dérapage. Et des dérapages, il y en aura. Notamment avec le massacre d'un village où les soldats rejettent leurs haines et leurs frustrations en torturant de simples villageois. On constate aussi l'abus d'autorité de certains officiers.

Vous l'aurez compris, ce film est profond et riche en analyse Le réalisateur traite intelligement et finement le sujet.
Au niveau de la forme, le film possède un casting prestigieux et les perfomances d'acteurs sont très bonnes surtout Martin Sheen, juste, touchant et émouvant. A noter la très bonne utilisation de la voix off pour le personnage principal qui donne une dimension intimiste et une certaine proximité avec le spectateur. Le long métrage marque également par son thème musical mélancolique et tragique. Les plus sensibles verseront sans doute une larme.
Son réalisme est également une grande qualité : c'est Olivier Stone, le metteur en scène, qui nous partage son expérience au retour de la guerre. Le long métrage est très bien rythmé et mis en scène qui comme tout bon film de guerre nous émeut et nous prend aux tripes.

En conclusion, c'est un excellent film, riche, profond et marquant. Souvent sous-estimé à tord par rapport à ses homologues comme "Apocalypse Now", "Full Metal Jacket" ou "Voyage au bout de l'enfer", il ne faut surtout oublier ce chef d'oeuvre qui comme chacune de ses oeuvres apportent un éclairage, une vision et un style nouveau à ce conflit qui tué des millions et des millions d'êtres humains
TheStalker

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10

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