Il est loin le temps où Jackie Chan dominait sans partage le box-office hongkongais. Depuis sa relocalisation en Chine continentale et ses prises de paroles polémiques sur la politique locale, la star du kung fu s’est mis une bonne partie de la population à dos. Si bien que ses films actuels sortent dans une indifférence quasi-générale. Railroad Tigers, son tout dernier film, ne fait pas exception à cette nouvelle règle. Pourtant, malgré l’inanité des performances récentes de Jackie Chan, la présence derrière la caméra de Ding Sheng, auteur en 2009 d’un Little Big Soldier de bonne facture, pouvait tout de même laisser espérer quelque jolie surprise.
Dans une ville chinoise sous occupation japonaise, Ma Yuan (Jackie Chan) et son groupe d’amis participent à la résistance contre l’envahisseur en dévalisant des trains affrétés par l’armée nippone. Mais, un jour, le survivant d’une escouade de la 8e armée trouve refuge chez lui. Malgré une sérieuse blessure, le soldat entend bien terminer sa mission : détruire un pont vital dans l’approvisionnement en hommes et matériel des divisions japonaises. Quand il se fait arrêter par la police militaire, Ma Yuan et sa troupe décident de faire sauter l’ouvrage.
Papy fait de la résistance
Si l’on omet un prologue dans le présent complétement inutile, Railroad Tigers commence plutôt bien. La reconstitution de la ville chinoise des années 1940 est vivante et soignée, le groupe de héros attachant et les antagonistes menaçants a souhaits. Le train, qui a décidément le vent en poupe ces temps-ci après des films comme Train to Busan ou Age of Shadows, est un terrain de jeu parfait pour Jackie Chan et sa troupe : il permet a l’acteur de mettre en œuvre une formule bien calibrée, mélange d’action et de comédie. La marque de fabrique de la star se déploie avec brio notamment lors d’une sympathique séquence d’infiltration d’un entrepôt. Afin d’apporter un peu de modernité à son film, Ding Sheng se permet quelques fantaisies (séquences animées, arrêt sur images pour présenter les nouveaux personnages…) qui dynamisent adroitement son récit.
Quand Papa Schultz rencontre Le Train
Malheureusement, tous ces efforts sont mis à mal à mesure que l’histoire progresse par un nationalisme forcené et de grosses ficelles scénaristiques. Outre le fait que la seule force armée chinoise montrée à l’écran soit la 8e armée du Parti Communiste Chinois, l’ennemi, l’armée japonaise, est dépeint sans nuance. Violent et cruel, cela va sans dire, mais il s’agit la d’une convention du genre. Plus gênante sont en revanche son incompétence crasse et sa foncière stupidité. Imaginez un film comme Le Train de John Frankenheimer peuplé d’Allemands tout droit sortis de la série Papa Schultz, vous aurez alors une idée de la seconde partie de Railroad Tigers. Avec des méchants aussi ridicules, les enjeux se délitent rapidement et on assiste aux exploits de nos vaillants héros avec un désintérêt poli. Le final a beau tenter de multiplier les moments de bravoure, notre incrédulité est bien trop mise à l’épreuve pour que cela suffise à récupérer l’attention d’un public qui, à ce stade, a déjà jeté l’éponge.