Inversion des machines : on ne pouvait décemment pas imaginer, avec un engin comme la DeLorean, s’en tenir au passé. Retour vers le futur II propose ainsi, quatre ans après l’original, une suite permettant un bond de trente ans vers l’avenir.


La vision d’un futur désormais dépassé comporte évidemment son lot de saveurs : on découvre ainsi un futur sans internet, mais avec l’overboard ; l’uchronie visant à exacerber la mode vestimentaire des 80’s dans un déluge coloré du futur est elle aussi assez amusante. Plus inquiétante est la vision prophétique d’une société presque orwellienne où les employés sont surveillés et virés par fax, et l’anticipation du placement de produit aujourd’hui banalisé, mais ici particulièrement visible : Texaco, Pepsi ou Mattel se font bien plaisir à imaginer leur monopole futur.


Ce deuxième opus n’a pas tout le charme du premier : à la tendresse pour une période révolue et au jeu grisant d’intervenir pour favoriser sa propre naissance succède une vision plus hostile et une incursion dans une uchronie obscène : c’est le versant dangereux de l’invention, où les tiers viennent s’emparer d’une invention à dimension intime pour la dévoyer vers le pouvoir et l’enrichissement personnel : autre lucidité des années 80 que de bien comprendre comment le monde tourne.


Le clinquant du futur est certes amusant, mais pique un peu les yeux. Doc parle en permanence, et tente, tant bien que mal, d’expliquer les temporalités alternatives, une idée somme toute assez habile pour une parenthèse cauchemardesque dans ce qui se révèle une caricature de tout ce que la civilisation d’alors peut avoir de détestable.


La franchise a déjà conscience de son propre culte : la réécriture est le carburant même de bien des scènes (notamment le réveil de Marty face à sa mère, alors qu’il croit sortir d’un cauchemar), permettant au spectateur ses propres voyages dans le temps sans cesse répété de cet univers narratif. C’est amusant, mais redondant aussi : il suffit de voir à quel point le splendide thème musical, utilisé avec tact dans le premier opus, devient ici une scie constante.


Enfin, c’est évidemment l’inspiration principale qui fait froid dans le dos : la destinée de Biff, milliardaire devenu l’homme le plus puissant d’Amérique est bien entendu inspirée d’un trublion bling bling de l’époque, à savoir Donald Trump.


Nous voilà bien bredouilles, et les mots nous manquent aujourd’hui.

Sergent_Pepper
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le 24 mars 2017

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Sergent_Pepper

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