Si vous aimez le cinéma, vous devez connaître la réputation que Paul Verhoeven se trimbale depuis ses débuts, celle du hollandais violent. En effet, le réalisateur néerlandais a toujours suscité la polémique parce qu'il aborde frontalement des sujets brûlants comme l'homosexualité, le sexe, la violence ou le pouvoir. RoboCop était un film subversif à plus d'un titre, une sorte de pamphlet contre la société capitaliste qui n'hésite pas à abuser de la violence légitime afin d'assoir un pouvoir corrompu par l'argent et le vice. Je trouve ça amusant qu'on reproche à ce film d'être réactionnaire alors que son propos est tout l'inverse ; ainsi transformer en robot policier un flic lambda victime de crapules par une entreprise qui fricote avec ces mêmes crapules fait tout le sel de cette histoire à plusieurs niveaux de lecture. En dehors du pamphlet anticapitaliste, il faut également souligner l'excellente mise en scène de Verhoeven parvenant à donner vie à ce Detroit déliquescent avec toute l'habileté d'un vieux briscard et un scénario subtil qui arrive à marier un récit d'anticipation explosif et une charge virulente contre les travers de la société occidentale, des effets spéciaux magnifiques exploitant brillamment le stop motion (une technique bien plus impactante que les images de synthèse à mon avis), une interprétation sans faille d'acteurs impliqués (Peter Weller en tête) et une bande son magistrale signée par Basil Poledouris (Conan le Barbare, c'est lui) qui apporte à RoboCop une touche crépusculaire bienvenue. Non, cette œuvre n'est pas réactionnaire, il s'agit d'un formidable long métrage d'anticipation, intense et irrévérencieux qui ne perd jamais de vue un sous-texte fort, celui de l'aliénation de l'homme par la technologie et la course perpétuelle au profit menant à l'inévitable dégénérescence de la civilisation humaine. À méditer.