C'est marrant un film qui parle d'assumer ce que l'on est mais qui ne s'assume pas lui même. L'idée de départ est pourtant plutôt intéressante : Adam vit seul dans une grande tour et fait la rencontre de son mystérieux et attirant voisin. Une relation se noue et en même temps, Adam retourne dans la maison de son enfance, où il retrouve ses parents, pourtant morts dans un accident il y a des années. "All of us Strangers" évoque des thèmes forts et poignant, c'est l'histoire d'un jeune homme terriblement seul, qui se trouve la capacité de dialoguer avec des proches défunts puis qui doit apprendre à s'en séparer pour vivre dans le monde réel, pour vivre sa propre vie.


On évolue donc dans le registre du drame matiné de fantastique. Sauf que le film ne semble jamais vouloir entrer complètement dans ce dernier registre. Les retrouvailles d'Adam avec ses parents tombent comme un cheveux sur la soupe et on ne saura jamais depuis combien de temps il possède cette capacité? Au vu de ses conversations, il semble que ce soit quelque chose de totalement nouveau mais alors on ne voit pas trop le rapport entre sa rencontre avec Henry et ce postulat fantastique. D'ailleurs, Adam ne semble jamais surpris de retrouver ses défunts parents et on aura jamais d'explications sur la nature du phénomène : est ce que c'est réel? Où est ce que c'est juste l'imagination du personnage, une sorte de lieu qui n'existe que dans sa tête? Parce que Adam étant écrivain, cette idée que l'imagination puisse créer un monde tangible est une piste qui aurait pu être légitime... Mais le film donne constamment l'impression d'éprouver une espèce de dédain pour cet aspect fantastique.

Alors ok, les conversations de Adam avec ses parents sur son homosexualité sont assez intéressantes dans ce qu'elles évoquent ce qu'on a appelé "La Solitude Gay", à savoir la façon dont le rapport de la société à l'homosexualité affecte la vie des jeunes LGBT dès leur enfance et les conséquences que ça laisse sur leur vie adulte mais on a du mal à voir le rapport avec la mort de ses parents.


De la même façon, la rencontre entre Adam et Henry est un peu soudaine et aurait mérité plus de développement. Surtout qu'avec sa dégaine (c'est quoi cette moustache et ces fringues dégueu?), j'étais persuadé que Henry était aussi une construction de l'esprit de Adam. Je ne suis déjà pas un grand fan de Paul Mescal (désolé, "Aftersun" c'était chiant comme un album de Bénabar) mais jamais je ne suis parvenu à croire en son personnage, ni dans celui incarné par Andrew Scott (que je n'ai jamais aimé non plus, je l'ai toujours trouvé très...froid, je lui trouve un manque de chaleur et de sympathie) et donc encore moins en leur relation.


Il y a d'autres éléments assez étrange et inexpliqués comme l'immeuble dans lequel les deux protagonistes vivent qui est totalement vide. Et la scène finale ruine encore un peu plus le film.

En fait, j'ai plutôt eu l'impression de voir deux intrigues qui ne parviennent jamais à cohabiter : une "romance" gay entre deux êtres solitaires et un drame fantastique, mais l'une intéresse beaucoup plus le réalisateur, pas la meilleure malheureusement.

DocteurBenway
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le 22 févr. 2024

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