Malgré une évidente volonté de peaufiner son protagoniste, incarné par un Jean Luis Trintignant volontaire, qui s'exprime à travers l’installation de gimmicks plus ou moins réussis —voir le pauvre bougre se laver les pognes à tout bout de champ fait qu’on se pose la question de l’origine de son toc—, Philippe Labro passe totalement à côté de son sujet. Du thriller paranoïaque oppressant inspiré du pessimisme ambiant qui entame doucement l’autre côté de l’atlantique, il ne parvient à tirer qu’un polar boiteux ennuyant au possible : pas facile de courser un sniper perché à 500 mètres de sa position quand on est chaussé de pantoufles.


Malgré un casting qui fait autant rougir qu’il file le sourire, dont la petite cerise est tout de même le toujours charismatique Jean-Pierre Marielle, Sans mobile apparent tombe à plat, à tous les niveaux. Sa mise en scène est paresseuse au possible : que ce soit pour mettre en boîte des interrogatoires tranquilles ou des exécutions qui se veulent brutales, l’inspiration manque. Voir toutes les victimes simuler l’impact d’une balle qu’on n'entend jamais arriver est troublant, voir ridicule. Comme l’est la pose d’athlète paralympique que prend le gars Jean-Louis pour tirer sur l’homme qu’il traque avec un pauvre révolver alors qu’il ne peut qu’apercevoir son reflet. Certes, il est le tireur redouté du coin, mais tout de même, faudrait pas trop nous prendre pour des pommes.


Là-dessus, le pauvre Morricone se débat pour livrer un score respectable, mais on devine que la motivation n’était peut-être pas tout à fait de la partie. Sa partition est tout juste anecdotique, mais est-il à blâmer : aucune scène n’est véritablement marquante, les seules qui pourraient l’être —les mises à mort— sont dépouillées de tout artifice sonore : un choix vraiment douteux.


En transposant un roman New-Yorkais dans l’ambiance méditerranéenne d’une pauvre Nice qui n’est jamais mise en valeur, Labro se contente de livrer une transposition linéaire d’une histoire qui ne fait jamais d’effet. Les indices s’enchaînent mécaniquement, l’intrigue se délie sans surprise, le pot aux roses se laisse deviner très vite, le final, quant à lui est au niveau du reste : terne, sans idée, précipité.


Dommage, l’intention, très respectable et prometteuse, était pourtant bel et bien là.

oso
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste L'ours, Homo Video, en 2016

Créée

le 13 juin 2016

Critique lue 1.3K fois

6 j'aime

oso

Écrit par

Critique lue 1.3K fois

6

D'autres avis sur Sans mobile apparent

Sans mobile apparent
AMCHI
7

Les US à Nice

Philippe Labro en amoureux de la culture américaine transpose à Nice un roman new-yorkais d'Ed McBain. Sans mobile apparent est un polar solide, efficace et carré bien que l'on ne soit pas bluffé par...

le 12 mai 2022

12 j'aime

10

Sans mobile apparent
USEFOOL
8

Critique de Sans mobile apparent par USEFOOL

Ok, ok, je surnote ce film pour deux raisons évidentes, la premiere tient évidemment dans le score de Morricone ( intriguant et paisible ), la deuxieme dans le choix des acteurs ( Trintignant en...

le 14 juin 2013

12 j'aime

1

Sans mobile apparent
cinemusic
7

Cadavres à Nice

L'inspecteur Carella (Jean-Louis Trintignant) est chargé d'enquêter sur une série de meurtres semblables. Carella va tenter de trouver un lien entre les morts... "Sans mobile apparent" est le...

le 10 nov. 2022

10 j'aime

7

Du même critique

La Mule
oso
5

Le prix du temps

J’avais pourtant envie de la caresser dans le sens du poil cette mule prometteuse, dernier destrier en date du blondinet virtuose de la gâchette qui a su, au fil de sa carrière, prouver qu’il était...

Par

le 26 janv. 2019

81 j'aime

4

Under the Skin
oso
5

RENDEZ-MOI NATASHA !

Tour à tour hypnotique et laborieux, Under the skin est un film qui exige de son spectateur un abandon total, un laisser-aller à l’expérience qui implique de ne pas perdre son temps à chercher...

Par

le 7 déc. 2014

74 j'aime

17

Dersou Ouzala
oso
9

Un coeur de tigre pour une âme vagabonde

Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...

Par

le 14 déc. 2014

58 j'aime

8