Superbe et traumatisant, bien que je fus très déçu de constater que Dog Pound, le dernier film de Kim Chapiron que j’avais (donc forcément) trouvé excellent, en était le remake quasi exact. Une légère différence dans la forme (monochrome chez Clarke, frénétique chez Chapiron) et deux/trois partis pris comme l’absence dans le Chapiron de ce personnage incroyable chez Clarke, végétarien qui refuse de porter du cuir, écrit I am happy sur la peinture fraîche et monologue sur la confiance et l’établissement qui engendre le mal. Scum fonctionne aussi à l’énergie mais se remplit davantage de vide au sens où il ne se base pas sur un scénario sensationnel, ce qui intéresse Clarke ce sont les rapports de force au sein d’un mécanisme plein de rage rentrée avant qu’elle n’explose. Il n’y a pas de montage traditionnel. Hormis cet aspect de début (l’arrivée dans le borstal de trois petits nouveaux aux parcours bien eux) et de fin (la mort d’un détenu, le réfectoire saccagé) le film n’égrène que des saynètes sans véritable unité de temps, simple mosaïque de la violence qu’engendre ce système de rétention répressif. C’est impressionnant, c’est un film coup de poing au sens non galvaudé du terme et tout cela sans que le réalisateur n’appuie ou ne s’apitoie. Ni emphase ni sentimentalisme chez Clarke. Chaque détenu, aussi faible ou puissant qu’il soit, s’il prend des gnons justifiera ses bleus en disant qu’il a simplement glissé. Un caïd se fait défoncer, il disparaît. Un autre prend sa place. La fin, similaire dans les deux films, symbolise formellement cette différence qui règne entre l’original et son remake : plus longue d’un côté, démonstrative autant qu’elle est terrifiante tandis qu’elle est plus forte de l’autre, dans son économie et un épilogue à foutre des frissons…). En fait c’est simple, le Clarke me donne l’impression de voir un « 120 journées de Sodome » légal (même si les établissements en question ont été fermés peu de temps après l’action du film) dans lequel les gardiens participeraient moins aux sévices mais feraient en sorte que leurs prisonniers se les fassent entre eux. Le Chapiron a ce côté film hollywoodien édifiant, très écrit, très clean, presque trop formaté. Le Clarke semble avoir été fait en deux temps, il a ce climat que l’on retrouve nul part ailleurs si ce n’est dans les autres films de Clarke bien entendu.
JanosValuska
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top 10 Films 1980

Créée

le 14 nov. 2014

Critique lue 638 fois

6 j'aime

2 commentaires

JanosValuska

Écrit par

Critique lue 638 fois

6
2

D'autres avis sur Scum

Scum
Truman-
9

This is England

Nous sommes envoyé dans un centre de redressement pour mineurs au coté de Carlin jeune homme a la réputation de caïd, peu a peu on y découvre l'univers carcéral, la dureté des règles, la violence...

le 23 janv. 2014

25 j'aime

4

Scum
Kenshin
8

"Where is your tool?" "What fucking tool" ZBAM!

Froid et sans s'appesantir sur le pathos Alan Clarke nous fait pénétrer dans une maisons de redressement anglaise. Sans complaisance, sans issue, sans fioriture, sans musique même. Scum est un film...

le 27 févr. 2012

19 j'aime

7

Scum
Fatpooper
7

Enfants de choeur

"Scum", c'est un peu un film de prison : les détenus sont ici des jeunes gens placés dans un centre pour délinquants qui subissent l'oppression de gardiens mais vivent aussi selon la loi du plus fort...

le 25 juin 2014

11 j'aime

12

Du même critique

La Maison des bois
JanosValuska
10

My childhood.

J’ai cette belle sensation que le film ne me quittera jamais, qu’il est déjà bien ancré dans ma mémoire, que je me souviendrai de cette maison, ce village, ce petit garçon pour toujours. J’ai...

le 21 nov. 2014

32 j'aime

5

Titane
JanosValuska
5

The messy demon.

Quand Grave est sorti il y a quatre ans, ça m’avait enthousiasmé. Non pas que le film soit  parfait, loin de là, mais ça faisait tellement de bien de voir un premier film aussi intense...

le 24 juil. 2021

31 j'aime

5

Le Convoi de la peur
JanosValuska
10

Ensorcelés.

Il est certain que ce n’est pas le film qui me fera aimer Star Wars. Je n’ai jamais eu de grande estime pour la saga culte alors quand j’apprends que les deux films sont sortis en même temps en salle...

le 10 déc. 2013

28 j'aime

8