Tout comme le péplum, le western est un genre cinématographique qui a fait son temps, avec bon nombres de titres cultes (Rio Bravo, Pour une poignée de dollars, Il était une fois dans l’Ouest et consort) et qui s’est décliné au fil du temps. Et si certains ont voulu ressusciter cette gloire d’antan (Clint Eastwood avec Impitoyable et Kevin Costner avec Danse avec les Loups), le western n’arrive toujours pas à retrouver sa place dans le cœur de nos générations. Les débuts de ces années 2000 voient néanmoins quelques réalisateurs s’essayer au genre. À nouveau, Costner revient à la charge avec son très réussi Open Range. Ron Howard entrait dans le genre avec Les Disparues. James Mangold s’attaque au remake de 3h10 pour Yuma avec des têtes d’affiches impressionnantes (Christian Bale et Russell Crowe). L’acteur Ed Harris fait ses débuts de réalisation avec Appaloosa. Et enfin, après Inglourious Basterds, Quentin Tarantino nous livre enfin son fantasme avec l’inoubliable Django Unchained. Parmi la liste de ces westerns modernes, il ne faut pas oublier Seraphim Falls. Film méconnu en France (car étant sorti directement en DVD en 2008), n’ayant pas fonctionné aux Etats-Unis (soit seulement 413 877 $ au box-office national), et ce malgré la présence au casting de Pierce Brosnan et de Liam Neeson. Et pourtant, il n’y pas de quoi jeter Seraphim Falls aux oubliettes !

On peut comprendre que certains aient été réticents face l’histoire, tant celle-ci ne présente aucune originalité sur le papier (soit un homme traqué par un autre dans les plaines sauvages). Mais ce qui fait quelque part l’intérêt de Seraphim Falls, c’est son manque de détails dans le script. Et pour cause, à peine démarrer, le film nous lâche aussitôt en plein milieu de cette traque (le fugitif se faisant tirer dessus par le poursuivant) qui se poursuit jusqu’à la fin du film, sans que l’on sache qui est qui, pourquoi cet homme est-il pourchassé, pourquoi le leader du groupe lui voue une haine sans relâche… Tant de détails qui apparaîtront bien évidemment au fur et à mesure. Mais un tel procédé permet ainsi d’offrir au film une note de suspense supplémentaire, en plus du suivi de la traque. Nous permettant d’avoir des doutes sur le statut de chaque personnage (qui est le gentil ? qui est le méchant ?) et donc de s’attacher à chacun de ces derniers. Bien entendu, je ne vous révélerai pas la cause de cette traque (racontée lors d’un flash-back plutôt prenant), ça serait gâché le plaisir du film !

De plus, Seraphim Falls peut se vanter d’appartenir au genre du western, le film reprenant sans le cacher tous les clichés, détails et codes du genre :
_des personnages solitaires au passé mystérieux
_les plans qui s’attardent sur les paysages des plaines de l’Ouest
_le côté raciste (les Chinois en prennent pour leur grade) et virile (peu de femmes)
_le danger que représente la traversée du désert
_le face-à-face qui se présente en un duel (rapide)
Bref, Seraphim Falls est un western à part entière qui préfère revendiquer son genre (plutôt que de le renouveler) pour garantir son statut de divertissement. Et le film remporte son pari ! Surtout en offrant les rôles principaux à Pierce Brosnan et Liam Neeson, deux acteurs d’envergures ayant une classe folle et qui prouvent que jouer dans un film au succès moindre ne veut pas dire qu’il faut oublier l’interprétation de qualité. Et cela, les deux comédiens le montrent avec brio (rien que voir la douleur que fait ressentir Brosnan pour s’extirper la balle de son bras reste un moment poignant, bien loin de la fantaisie de Stallone dans Rambo 3 !)

Malheureusement, Seraphim Falls n’est pas sans défauts. Et le premier (et pas un des moindres) provient du fait que le film entier soit une traque qui s’étend sur 1h55. Si les causes de cette chasse à l’homme nous sont révélées au cours du film, elles ne sont néanmoins pas lâchées au compte-goutte. De ce fait, nous regardons un homme poursuivi par d’autres, instaurant au film un sentiment de longueur et presque d’ennui. Si le film tient plutôt en haleine, il est fort dommage d’avoir l’impression que la plupart des scènes soient rajoutées ou rallongées, juste pour entrer dans la durée du film (comme les innombrables plans où l’on voit un paysage avec les personnages en silhouette, sur leur cheval respectif). Du coup, les 1h55 semblent parfois durer un peu trop, jusqu’à un final qui sent bon le n’importe quoi ! Je veux parler de la partie désertique où les deux personnages principaux vont effectuer leur second face-à-face après avoir vu une colporteuse sortie de nulle part. Est-ce une personnelle réelle ? Un mirage ? Rien n’est dit, provoquant ainsi le doute sur le spectateur et faisant entrer pendant quelques minutes Seraphim Falls dans le genre fantastique. De quoi foirer un ensemble qui, depuis le début, s’en sortait plutôt bien.

Malgré ces défauts, Seraphim Falls n’a pas mérité son échec commercial. Le film a tout du western à part entière, une certaine efficacité niveau suspense et des gueules d’affiche attrayantes. Il est également fort dommage que ce film est subi la loi du box-office américain pour ne pas sortir dans les salles étrangères. Car il ne faut pas oublier que la qualité d’un film n’est pas due à ce qu’il rapporte mais bien à ce à quoi il ressemble. Et ça, les Américains ne l’ont jamais compris ! Hollywood…

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le 30 avr. 2013

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