Ce qui était à l'origine une série télé japonaise s'est transformé en deux films de cinéma distribués à une semaine d'intervalle, affublés d'intitulés de chapitres à la Millenium, histoire de les distinguer. Ce qui s'annonçait comme une longue et fouillée parabole sur comment vivre après un traumatisme s'est peu à peu métamorphosé en un lourdaud thriller où l'idée principale de la pénitence s'est essentiellement incarnée dans le meurtre avant de déboucher sur un épilogue longuement explicatif et largement improbable qui semblait ruiner la charge narrative des quatre segments précédents de valeur indéniable, quoique inégale.

On soulignera néanmoins la précision de la mise en scène et la rigueur d'un scénario multipliant les recoupements. Le personnage pivot et central de la mère se démultiplie dans les existences des quatre amies de sa petite fille assassinée, investies de la cruelle mission de faire pénitence tant que la mémoire de l'identité du criminel ne leur reviendrait pas, ou du moins ne permettrait pas son identification. Au-delà des méandres très sinueux d'une tragédie aux ramifications insidieuses, le film dévoile derrière une apparence excessivement polie et maitrisée à la limite d'une autodiscipline corsetée qui menace constamment de fléchir la cruauté d'une société nippone régie par des codes d'honneur qui nous échappent sans doute en grande partie. Alors âgées d'une dizaine d'années, les petites amies de la victime n'ont d'autre choix que d'accepter et d'endurer la sentence de la mère autoritaire. Quinze ans plus tard, elle a largement influé, voire détruit ou annihilé, leur existence présente faite de soumission, d'altération du jugement, de souvenirs envahissants et d'incapacité à passer outre. La scission artificielle des quatre rescapées ne cache certainement pas la possible interchangeabilité entre elles. Les qualificatifs des volontés de se souvenir ou d'oublier pouvant d'évidence s'appliquer aux unes et aux autres. Il sera peut-être intéressant de redécouvrir un jour les deux longs-métrages dans leur format initial car le découpage en cinq épisodes éviterait probablement l'impression de longueur.
PatrickBraganti
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le 20 juin 2013

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