Avant de vous ouvrir son coeur et sa fleur, "Showgirls" a deux secrets a vous révéler à propos de son personnage principal. Le premier est un subtil jeu de mots. "Nomi Malone" est une danseuse talentueuse au passé trouble. Derrière la consonance latine passe-partout du nom de famille se cache la nature et la détresse de l'héroïne. "Nomi Malone" est la contraction de "You know me, I'm alone". Le second secret est purement physique. Nomi a les yeux vairons. Deux traits, deux indices dont seul les multiples visions du film permettent de cerner la complexité d'un personnage qui ne manquera pas de vous glisser entre les doigts. Nomi est blessée. Nomi est magnifique et comme toutes les superbes déesses dessinées par Verhoeven, Nomi est humaine. Sculpturale et candide, l'étrangère se classe au milieu de trois héroïnes connues de la filmo du Hollandais. Sur l'échelle de l'expérience de la vie, l'adolescente Olga (Monica Van de ven) de "Turkish délices" et ses envies de tenir entre ses cuisses "la gauche artiste" ouvrirait le bal du cul dont Paul Verhoeven se verrait le pivot priapique.
Nomi incarnerait la vingtaine moins insouciante mais toujours animée de candeur. La Catherine Tramell de "Basic Instinct"(Sharon Stone) affiche la maturité de la trentaine offensive et Michelle Leblanc de "Elle" (Isabelle Huppert) son cynisme latent de femme mûre et calculatrice. L'intérêt que porte Verhoeven à Malone ne relève pas uniquement du pur fantasme masculin. Il en dissocie le corps en mouvement et l'esprit. Nomi c'est un peu le cœur tendre de DIsney et le cul du Lido. Une amitié sans faille pour ses amis, un vagin pour son évolution et des aréoles empoisonnées pour ses ennemis. Une jeune femme consciente de son pouvoir auprès de la gente masculine et qui en abusera en temps voulu. L'évolution du personnage se fera dès que l'héroïne aura compris les rouages d'un système complètement gangrené par le favoritisme et la politique du "triangle".


"Avec un vagin et des idées, on obtient un mélange détonnant" Sharon Stone


Taxer gratuitement "Showgirls" de bourrinade c'est en oublier la dimension politique. Non pas la politique verbeuse du débat d'idées mais celle plus organique qui consiste à négocier à la verticale. Chaque démonstration sexuelle du film est un pas vers autrui. Un langage quasi instantané dont la corporalité pourrait être le mode d'expression. La danse illustre parfaitement cette théorie même si elle peut paraître un peu grossière. Plus concrètement c'est l'acte sexuel pur et simple dans toute sa dimension qui exprime un échange, une parade ou encore une approche. Dans "Showgirls", le sexe est un spectacle. Il se monnaie en pole dance et se négocie en danse individuelle mais à ce niveau il reste fonctionnel et froid. Le sexe est aussi le refuge des sentiments avec un ami en devenir ou la négociation d'un contrat avec une huile de la production. Il se prend en viol collectif et se voit retourner violemment en fausse parade nuptiale.


Regarder "Showgirls" c'est comprendre la liberté de Verhoeven, artiste libre persuadé qu'Hollywood lui a laissé faire un film hollandais avec les moyens de L'Oncle Sam. Imaginer, le réalisateur, le doigt d'honneur se tendre dans sa poche à l'encontre d'un système toujours prompt à jouer de la censure un œil rivé sur le box office.

Star-Lord09
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes LA DERNIÈRE SÉANCE (Année 2016) et Les meilleurs films de Paul Verhoeven

Créée

le 26 nov. 2016

Critique lue 2K fois

71 j'aime

21 commentaires

Critique lue 2K fois

71
21

D'autres avis sur Showgirls

Showgirls
Star-Lord09
8

"´know me, I'm alone"

Avant de vous ouvrir son coeur et sa fleur, "Showgirls" a deux secrets a vous révéler à propos de son personnage principal. Le premier est un subtil jeu de mots. "Nomi Malone" est une danseuse...

le 26 nov. 2016

71 j'aime

21

Showgirls
Prodigy
7

Critique de Showgirls par Prodigy

Vulgos, con, outrancier, clinquant, bordélique, dopé à la provoc' minable, un scénar (ou une idée de scénar) de tonton Joe le beauf Eszterhas ... et pourtant je ne peux pas m'empêcher de surkiffer ce...

le 1 oct. 2010

62 j'aime

6

Showgirls
Sergent_Pepper
6

Trashdance

Revoir Showgirls à la faveur d’une rétrospective intégrale fait du bien à l’un des grands fours de Verhoeven : bien entendu, on est bien loin du chef-d’œuvre, mais tout autant l’est-on de l’étron...

le 25 mai 2016

54 j'aime

1

Du même critique

Midnight Special
Star-Lord09
8

ALTON EST LE FILS DE KRYPTON

C'est un critique malheureux qui prend la plume. Malheureux parce que l'orgasme filmique amorcé ne s'est pas produit. Malheureux parce que la promesse de caresser une époque révolue (celle des prods...

le 16 mars 2016

145 j'aime

87

Knight of Cups
Star-Lord09
8

DES DIEUX PARMI LES HOMMES.

Du plus haut des cieux avec "Tree of life" jusqu'au plus profond de l'âme humaine avec "To the wonder", voici venir l'entre-deux "Knight of cups" oeuvre du démiurge Malick. Si la palme d'or de 2011...

le 13 oct. 2015

116 j'aime

49

Youth
Star-Lord09
7

UN COUP D'OEIL DANS LE RETRO.

Youth est un boomerang qui, mal lancé, reviendrait dans la truffe du critique malin d'avoir découvert toutes les thématiques évidentes du dernier Sorrentino. A savoir la sagesse, le recul et surtout...

le 12 sept. 2015

101 j'aime

26