Les fans des années 80 qui portaient Rambo aux nues vont devoir réviser leurs souvenirs : par rapport à Aatami Korpi, l’immortel, de Sisu, Rambo n’était qu’un collégien ! Après avoir exterminé à lui seul 300 soldats russes, ce membre littéralement invincible d’un commando finlandais a décidé de se retirer des « affaires » et de se reconvertir en paisible chercheur d’or. Malheureusement pour lui, on est en 1944, les Allemands abandonnent la Finlande alors que l’étau russo-américain se resserre sur eux en Europe, et l’immortel, qui vient de trouver un filon et veut déposer son or à la banque, va trouver sur son chemin une colonne nazie. A partir de là, tout va aller de mal en pis, avec un crescendo de violence gore, et on va voir comment notre ex-militaire finlandais plus badass que les plus badass du cinéma US va exterminer les nazis à lui seul… ou presque.

Jalmari Helander, scénariste et réalisateur finlandais, a donc pondu cette histoire qui ne s’embarrasse d’aucune vraisemblance dans ses scènes d’affrontement violent, et souvent cruel, entre les méchants SS et son guerrier invincible, qui « refuse de mourir » : on nous explique en introduction du film que « Sisu » est un mot finlandais qualifiant une détermination suprême face à l’adversité… L’une des références de Helander est clairement Tarantino, dont il reprend sans vergogne les codes les plus célèbres, tels que le chapitrage du film, et la célébration de la vengeance féminine face aux abus masculins. Le tout, malheureusement, sans l’intelligence narrative ni le recul intellectuel de Tarantino, et avec un objectif déclaré d’aller toujours plus loin dans le gore et l’ultra-violence. Sisu est également irrigué par le western spaghetti, et en particulier les deux premiers films de la trilogie de Sergio Leone avec Clint Eastwood : le meilleur de cette approche plus « classique » du western est d’ailleurs l’importance conférée aux paysages – largement sinistres et désolés – de la Laponie (où le film a été effectivement tourné), qui deviennent des éléments à part en entière, quasiment des protagonistes du carnage généralisé auquel nous assistons. On peut également citer comme inspiration le convoi de femmes-esclaves de Mad Max : Fury Road, et la revanche finale de ces victimes se retournant contre leurs bourreaux a quelque chose de profondément jouissif, à un niveau quasiment primitif.

Avec son simplisme de Série B – les méchants sont des SS sans rédemption possible, le héros ne meurt jamais, quoi qu’il lui arrive – et son inventivité quand il s’agit de trouver de nouvelles manières de faire mourir horriblement ses personnages, Sisu s’avère profondément réjouissant… une fois qu’on a abandonné l’espoir de voir à l’écran quoi que ce soit de réaliste, bien entendu. Si l’on se réjouira profondément de l’absence totale d’humour et de second degré dans le film (la grande tare du cinéma populaire US depuis des décennies), on déplorera quand même que Jalmari Helander n’ait pas essayé de dépasser ses modèles, ou tout au moins de construire quelque chose d’un peu plus personnel sur ces modèles. Et on s’étonnera du choix absurde de faire parler ses personnages en anglais, ce que Tarantino n’aurait jamais fait… à moins de considérer ça comme un autre hommage à la série B hollywoodienne qui ne s’est jamais embarrassée de vraisemblance linguistique.

[Critique écrite en 2023]

https://www.benzinemag.net/2023/06/25/sisu-de-lor-et-du-sang-super-rambo-en-laponie/

EricDebarnot
6
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le 25 juin 2023

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Eric BBYoda

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