De tous les films de Tarkovski, "Solaris" en est peut être le moins sensitif, le moins majestueux, le plus glacial : le cinéaste dépeint les tourments de l'âme et l'incapacité d'oublier avec une austérité peut être jamais atteinte dans son œuvre. Une fois de plus, l'intelligible s'oppose au sensible, la raison aux impressions : mais le point de vue de Tarkovski se fait ici particulièrement pessimiste en ce que la confrontation à la réalité est particulièrement rude, condamnant l'Homme (le scientifique submergé par le spectre de sa défunte épouse) à subir indéfiniment ses douloureux souvenirs. La beauté intrigante de la mise en scène impressionne par ce qu'elle renferme en densité psychique, faisant cohabiter de façon troublante le réel désincarné et un univers rempli de fantasmes, glissant vers un peu vers un onirisme toujours plus froid et désespéré ...