Наталья Сергеевна Бондарчук

Rarement vu un film aussi sublime et foutraque à la fois. Parait-il qu'il ne faut pas commencer l'oeuvre de Andreï Tarkovski avec "Solaris". Il se trouve que je ne savais pas qu'il s'agissait de l'illustre réalisateur. Qu'importe. Je voulais me confronter à un monument de Science Fiction. J'ai l'impression au final d'avoir vu un film qui refusait le genre auquel il était affilié.

"Solaris" m'a visuellement skotché. Dès ce premier plan de végétation aquatique ondulante j'ai été happé, hypnotisé par ces images, ces cadrages lents, ces mouvements de caméra dignes et empreints d'une touche de sacré indéfinissable. Andreï Tarkovski aurait pu poursuivre sa lente promenade d'herbes aqueuses et d'arbres noirs surplombant de larges flaques indéfiniment que je n'aurais pas été déçu.

Hélas, ponctuellement, "Solaris" perd brusquement de sa superbe. Comme si la créativité (l'implication ?) du réalisateur était sur courant alternatif. La scène d'interrogatoire du pilote russe par exemple se déroule de façon peu amène. Elle parait mal montée, peu engageante, alors qu'elle doit servir d'élément déclencheur à une prise d'intérêt rapide de la part du spectateur sur le nœud de l'intrigue. De la même façon à bord de la station spatiale survolant la planète océan Solaris - cœur de l'intrigue - les images saisissantes sont minorées par des passages décousus, dépourvus d'impact. Ce n'est jamais un plan exagérément long qui chagrine, plutôt des dialogues ou comportements joués / mis en scène par dessus la jambe qui plombent la tension de ce singulier "Solaris".

Le pire étant que l'intrigue en pâtit grandement. Si la fin rattrape superbement le tout dans un propos non pas universel ("Solaris" est l'anti "2001 L'odyssée de l'espace" par excellence) mais plongeant au cœur de l'intimité du personnage principal (Donatas Banionis, aussi monolithique qu'impeccable), le déroulé global de l'histoire à bord de la station est finalement très maigre... Alors qu'il y avait tant à raconter, à montrer, à suggérer... Il est quand même paradoxal qu'un film de science fiction fascine avant tout pour sa première partie se déroulant dans un jardin sur Terre.

Heureusement, pour maintenir le spectateur éveillé, et souvent l'émouvoir profondément, l'actrice Natalia Bondartchouk éclabousse la pellicule de sa présence, de son aura quasi mystique. En peu de mots, quelques postures, elle exprime tout le désarroi de son personnage en quête d'identité, de raison d'être, écho d'un fantôme tentant de prendre vie...

"Solaris" n'a pas été la claque annoncée. En revanche, ce n'est définitivement que partie remise avec Andreï Tarkovski. Si "Solaris" est un film mineur dans sa filmographie, je n'ose imaginer les splendeurs qui m'attendent.
Hypérion
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le 14 avr. 2014

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Hypérion

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