Quand Spider-Man sort au cinéma en 2002, le film fait office d’un chamboulement total quant au genre super héroïque. Dans un premier temps parce que son réalisateur pose les bases du film matriciel Marvel de la décennie suivante, et ensuite parce que pour la première fois, le film n’est pas centré sur le super héros - Spider-Man - mais sur l’homme derrière le masque - Peter Parker. Cette nuance apporte une dimension unique au personnage et provoque une identification quasi immédiate avec le spectateur. Le succès sera au rendez-vous, ce qui poussera Sony à laisser carte blanche à Raimi pour le 2e opus des aventures de l’homme araignée.



“I believe there’s a hero in all of us”



Si le premier volet de la saga était déjà une réussite, il pâtissait à plusieurs moments de balbutiement scénaristiques et visuels inhérents à l’ambition folle du projet. Avec cette suite, et la totale liberté dont il dispose, Sam Raimi va s’en donner à coeur joie. Plongeant à fond dans son idée de départ, il délaisse quasi totalement Spider-Man pour ne se concentrer que sur la lutte intérieure de son personnage principal. Là où le premier film se concentrait sur le fait d’assumer les responsabilités liées au fait de devenir un super-héros (un grand pouvoir implique de grandes responsabilités, tout ça tout ça etc), il sera bien plus question ici de faire des choix de vie face à l’éventualité de laisser passer l’amour de sa vie.
Ainsi, le film trouve sa véritable force dans les “petites” scènes, celles qu’on n’a pas forcément l’habitude de voir dans ce genre de production, et qui sont réellement le cœur émotionnel du film. On peut penser par exemple à cette séquence chez le psy (“j’ai un ami qui rêve qu’il est Spider-Man”), à quasiment tous les échanges avec Mary-jane, qu’ils soient parlant ou muet, mais surtout à toutes les séquences où Peter se retrouve face à Tante May. Tante May qui possède d’ailleurs les plus belles répliques du film et qui sert de pivot au destin de Peter. Des scènes de dialogues magnifiques qui culminent en un moment magique entre des cartons de déménagement, sur un aveu non prononcé mais tellement clair, qu’elle sait qui il est. Et sans lui dire frontalement, elle trouve les mots juste pour lui rappeler tout le bien qu’apporte son alter ego et l’espoir qu’il porte en lui. Si Mary-Jane est le moteur de l’histoire, Tante May en est le coeur émotionnel.


Mary-Jane Watson est au centre de la narration, et Sam Raimi ne s’en cache pas. Toute la crise que traverse Peter Parker est centrée sur son incapacité à faire cohabiter sa vie cachée et son amour pour elle. Après le passage à l’âge adulte, vient le temps d’assumer ces nouvelles responsabilités. Et si Raimi s’attarde énormément sur les déboires de son personnage principal, il n’en n’oublie pas Mary-Jane et de son propre combat intérieur pour l’amour de sa vie qui refuse de se livrer et qui ne fait que la décevoir, jour après jour. Ce sont ses choix qui dictent l'avancée du récit et c’est lorsque sa vie sera en danger que Peter embrassera une bonne fois pour toute la part super-héroïque qui sommeille en lui. Si abandonner le costume semble être le choix de la raison, permettant à Peter de s’accomplir professionnellement et humainement, l’amour et la peur de le perdre fait sauter les derniers cadenas et condamne une dernière fois cette vie qui n’est pas pour lui. C’est uniquement avec elle qu’il devient entier et assume enfin les fameuses responsabilités que son oncle lui a dicté dans le film précédent. Et comme un symbole, le film s’ouvre sur un gros plan d’elle souriant, témoin d’un avenir brillant, et se termine sur elle également, prise d’angoisse sur un amour dont elle sait pertinemment qu’il sera éphémère.


En mettant en lumières les femmes qui entourent la vie de Peter Parker, Sam Raimi démontre sa connaissance du matériel d’origine et n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de son hommage aux comics. On peut citer le générique d’ouverture (sur le même modèle que le premier film), plusieurs plans calquant de très célèbres cases de bd et bien évidemment sa compréhension du personnage principal. Outre l’impact des personnages féminins qui l’entourent, il appuie à de nombreuses reprises la loose qui habite Peter Parker, lui permettant d’alterner aisément entre comédie et drame.


Si le cœur du film est à mes yeux dans les “petits” moments, il serait injuste d’oublier la maestria d’action que représente ce deuxième opus. La carte blanche accordée à Raimi lui permet de complètement lâcher les chevaux et de se livrer à un exercice de mise en scène de haute qualité. Ne se refusant rien, il cite ses propres tropes de cinéma d’horreur à travers une séquence hallucinante en terme de cadrage, de découpage et de montage, puis va tout simplement pondre un sommet d’action avec la célèbre séquence du métro qui, presque 20 ans plus tard, n’a pas pris une ride, bien au contraire. New-York en terrain de jeu, la verticalité des buildings servant à merveille les pouvoirs de l’homme araignée, si Raimi a parfaitement compris le personnage de Peter Parker, il a également parfaitement assimilé ce qui rend Spider-Man aussi spectaculaire. La séquence du métro illustre tout cela à merveille tant il ne se passe pas une seconde sans que l’environnement soit un facteur d’action tout autant que les deux protagonistes, rendant la scène mémorable à tous niveaux.


Non content d’avoir défini les contours de ce que sera l’hégémonie du genre super-héroïque au cinéma (et qui ne s’est toujours pas renouvelé à ce jour), Sam Raimi atteint un sommet avec son Spider-Man 2 qui n’a toujours pas été égalé à mes yeux. Formellement magnifique et brillamment écrit, il combine à merveille drame et comédie, action et intimité. Un blockbuster total par un réalisateur qui a tout compris du personnage et du genre.
Brillant.

Strangelove
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le 16 janv. 2022

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Strangelove

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