Il est intéressant d'envisager "Submarino" comme une partie intégrante de l'oeuvre de Thomas Vinterberg, plus particulièrement en le connectant avec "Festen" et "La Chasse". Ces trois films flirtent avec le côté sombre de l'être humain, son vrai visage caché derrière une apparence qui semble obligatoire pour survivre, pour s'affirmer
L'inceste avoué dans "Festen" qui débouche ensuite sur une contre-introspection familiale, le mensonge puis l'affrontement face à un monde boursouflé de suffisance et de non-ouverture dans "La Chasse". Des situations éprouvantes pour la majorité des êtres humains. Vinterberg ne trompe pas son spectateur en lui graissant la patte, il va droit au but, ne s'entiche pas de la potentielle surprise ou dégoût du spectateur face à des situations éprouvantes.

C'est encore une fois le cas dans "Submarino", oeuvre bien moins connu que les deux films cités précédemment mais qui est, pourtant, le plus construit, le plus à même à faire réfléchir. Ce point est entièrement subjectif, tout dépend de la sensibilité, du passé, des connaissances du spectateur. Bref, "Submarino" ne laisse pas indifférent.
La force première réside dans cette sobriété affichée. Une sobriété qui illumine le long-métrage. Vinterberg ne souhaite pas faire la morale. Il pose les bases, des bases qui se transforment, qui s'élargissent au cours du film. Les deux acteurs principaux brassent un travail fabuleux, incroyablement riche tout en restant simple. La surenchère n'est pas de mise. Vinterberg s'immisce dans son propos sans vraiment s'immiscer. Sa mise en scène, toujours aussi sobre, laisse la place aux sentiments. Le spectateur est alors happé dans un cercle infernal, déchirant de par ses sujets (la famille, l'amour, la drogue) et par leurs traitements. Ces bases (famille, drogue, amour donc) sont étirées, malaxées pour en tirer l'essence même, l'essence de la douleur pure. Car "Submarino" est un long-métrage douloureux. Douloureux car il ne joue pas sur la carte sensibilité mais sur la carte réalité. Alors certes, cela reste du cinéma, mais l'impression de réalité est omniprésente (Jakob Cedergren donne l'impression d'avoir vraiment vécu cette histoire), ce qui accentue les divers sentiments possibles.

Raconter "Submarino" n'est peut-être pas une bonne idée, car il n'y a rien à raconter. C'est une histoire de vie. Une vie entrecoupée entres plusieurs. Un long chemin vers la paix dans un monde sans pitié. Une claque qui réveille, qui permet d'élargir ses points de vue sur divers sujets.
Thomas Vinterberg réussit encore son coup et s'impose comme un des réalisateurs les plus intéressants de ces dernières années.
Nikki
8
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le 10 oct. 2014

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