Sueurs, frissons, bref la fièvre !
Il est TRES difficile de parler des films d'Alfred Hitchcock comme d'un tout tellement ceux-ci peuvent être différents de l'un à l'autre, il est préférable de les voir un à un comme étant chacun une exploration nouvelle de pulsions et obsessions humaines (et souvent masculines).
S'il est sans conteste un des meilleurs films qu'il ait réalisé, c'est sans doute en premier lieu parce que VERTIGO réunit tous les ingrédients purement hitchcockiens : voyeurisme, sexe, mort, trouble, perte d'identité, machination, et amour. Le tout distillé avec beaucoup de perfidie dans un Technicolor somptueux et faussement rassurant.
Pour éviter de banaliser le sujet, essayons d'en faire ressortir l'étrangeté : un ex-policier ayant de fortes crises de vertiges, se retrouve engagé pour suivre la femme d'un ami, celle-ci ayant des moments d'absence et des pertes de mémoire. Évidemment si son enquête commence de loin, le détective va vite avoir beau jeu de se rapprocher de la jeune femme, lorsque celle-ci tente de se suicider. Après cette rencontre loin d'être innocente, notre héros découvre que la dame en détresse serait possédée par l'esprit d'une ancêtre morte au siècle dernier. Une idylle inquiétante s'en suit tandis que les pulsions suicidaires de la jeune femme ne font qu'augmenter. Bien sûr, tout cela finira très mal.
Et pour cause, le spectateur se retrouve aussi démuni devant les évènements que le pauvre James Stewart, tout est fait pour que l'on perde pied : l'atmosphère un peu vide du San Francisco de l'époque, la filature à distance d'une dame à l'allure glaciale, une musique plus qu'angoissante, un Technicolor privilégiant des teintes pastels froides et souvent sombres, des plans voulant souligner toute la dualité des personnages...
Beaucoup de stratagèmes qui vont rendre une histoire qui AURAIT pu être banale (même si adaptée de Boileau-Narcegac) en véritable chef d'oeuvre cinématographique. La scène du baiser entre James Stewart et Kim Novak où la caméra tourne autour d'eux et révèle un changement de décors entre le présent et le passé est une trouvaille en soi et une des pièces de l'intrigue savamment dévoilée au spectateur.
Kim Novak dont, soit dit non méchamment, c'est probablement la meilleure composition, de la femme distante, puis amoureuse et inquiétante, rentre dans le modèle type des héroïnes d'Hitchcock : blonde froide, brune volcanique, passé troublé, comportement binaire,.... Traits que l'on retrouve curieusement dans la plupart des films de David Lynch également.
James Stewart, acteur fétiche, est égal à lui-même, très juste dans un personnage embarqué dans une machination dont les rouages finiront par broyer tout le monde.