Super Mario Bros. fut la première des adaptations vidéo-ludiques au cinéma. Quoi de plus naturel donc qu'il se base sur le jeu-vidéo le plus connu au monde, créé par « le Steven Spielberg des jeux-vidéos », Shigeru Miyamoto (également concepteur de Zelda et Donkey Kong, entre autres). Super Mario Bros. est d'ailleurs resté longtemps le jeu-vidéo le plus vendu mondialement, seulement dépassé récemment par Wii Sports (autre production de Miyamoto pour Nintendo). Ce jeu est également connu pour avoir été un pionnier dans l'inventivité narrative, étant le premier jeu-vidéo avec une histoire qui se suit du début à la fin du jeu. Celle-ci est simple et étrange à la fois : Mario et son frère Luigi, deux plombiers, arrivent mystérieusement dans un monde fantastique peuplé de champignons et gouverné par la princesse Peach, qui a été envouté par un monstre-magicien maléfique nommé Koopa.


Ce film compte au total non moins de trois scénaristes, qui ont souvent réécrit le script au fur et à mesure du tournage, au grand dam des acteurs embarqués dans cette galère (Bob Hoskins, l'interprète de Mario, connu entre autres pour son rôle dans Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, dira notamment plus tard que ce film était « la pire chose qu'il ait faite de sa vie »), avec une volonté de "moderniser" cette histoire : les plombiers sont à présents deux new-yorkais d'origine italienne – bien que les acteurs les interprétant soient respectivement anglais et colombien, allez comprendre... (en fait, le rôle de Mario avait été proposé à Danny De Vito, choix on ne peut plus logique mais qui ne s'est malheureusement pas fait ; pour Luigi, John Turturro aurait pu coller au personnage et aurait pu offrir un rôle plus cohérent que celui de petit frère / fils adoptif dragueur que se coltine le pauvre John Leguizamo – qui avouera lui dans son autobiographie que les acteurs du film furent saouls durant tout le tournage, pour supporter ce naufrage intersidéral). Ils rencontrent Daisy (dont Luigi s'amourache), une jeune paléontologue recherchée par Koopa et ses acolytes Iggy et Spike (véritables personnages du jeu) pour l'emmener dans une autre dimension accessible grâce à un morceau de météorite magique. Cette météorite est celle qui a détruit les dinosaures il y a 65 millions d'années, créant en même temps cette autre dimension où quelques dinosaures ont survécu et évolué pendant ces 65 millions d'années jusqu'à devenir semblables aux hommes – ce sont donc Koopa et tout un peuple (y compris la princesse de ce monde, Daisy, bien que celle-ci soit à moitié d'origine champignon – alors que Toad, ici simple vagabond, semble lui être d'origine 100% dino, allez comprendre encore une fois...) qui y vivent. Mario et Luigi entrent ainsi dans ce monde étrange pour y retrouver et sauver la princesse Daisy (qui apparaît sur console de jeu dans Super Mario Land, la version Gameboy des aventures des plombiers).


Vous avez du mal à suivre ? Rassurez-vous, c'est normal... Devant tant d'énormités insensées, on en viendrait presque à penser que les producteurs, les scénaristes et les réalisateurs (oui, il s'y sont mis à plusieurs aussi) de ce film, ne sachant pas véritablement quoi faire de cette licence (de nombreux désaccords sur le public cible du film – enfant ou plus adulte – ayant notamment vu le jour), ont décidé de laisser libre cours à leurs idées les plus farfelues.
On voit ainsi par exemple un long moment de l'intrigue tourner autour du vol du morceau de météorite par une « grosse Bertha », sosie de Diva Avari (la séquence finissant d'ailleurs par une scène en discothèque assez torride/horrible rappelant le clip le plus connu de cette chanteuse, "Don't Go" de Starting Rock) censée être inspirée du poisson rouge géant de Super Mario Bros. 3, ou encore une séquence de toboggan géant entre Mario et quelques demoiselles en détresse. Par ailleurs, le film utilise de nombreux éléments du jeu (Bob-ombs, le désert Koopahari, présence de « fungus » un peu partout dans le film...), mais le plus souvent uniquement comme simple clin d'œil ou de manière peu fidèle (les pistolets des méchants ressemblent à ceux des consoles Nintendo ; les Thwomp Stompers sont un mix des Chaussures Goombas, des Thwomps, ennemis en blocs de pierre – tous deux apparus dans Super Mario Bros. 3 –, et des Bill-balles).
L'exemple le plus parlant à ce titre est ce qui est fait des Goombas : ennemis les plus connus de Mario, habituellement sortes de champignons marrons anthropomorphes à grosse tête, ils sont ici des habitants de "Dinohattan" (essentiel du monde des dinosaures, version négative de New-York ressemblant à la planète Mars de "Total Recall"... ou plutôt à un décor de Starmania) ayant subi une "dé-évolution" et ayant ainsi "retrouvé" une tête de reptile, toute petite (avec l'intellect qui va avec). En gros, ils ressemblent aux personnages ayant subi une réduction de tête dans le film Beetlejuice. Visuellement tout l'inverse des Goombas du jeu donc !
Reste que cette idée de dé-évolution est la plus amusante du film, évoquant de plus l'univers after-punk et déjanté du groupe Devo. Le film a ainsi le mérite d'être parfois drôle (même si ce n'est sans doute pas toujours fait exprès) et touchant, à l'image du personnage de Yoshi, ici bébé Tyrannosaure plutôt mignon – l'effet spécial (une marionette mécanique capable de faire 64 mouvements) n'est pas si mauvais, comme les autres du film d'ailleurs (si l'on fait abstraction que la même année sortait des films comme Jurassic Park, bien-sûr). Le film coûta quand-même 48 millions de dollars, ce qui est d'autant plus important qu'il ne rapporta même pas la moitié de cette somme. Un échec économique, critique et public total.


Selon Miyamoto, cet échec est essentiellement dû au fait que le film essaye d'être « un film à propos d'un jeu-vidéo, plutôt que d'être un film divertissant de et par lui-même ». L'erreur du débutant dans toute sa splendeur, en somme, pour ce premier film basé sur un jeu-vidéo.
À noter : le film vient de sortir en DVD aux États-Unis, en hommage à la disparition récente de la légende du cinéma Dennis Hopper, qui jouait le rôle de Koopa. Le pauvre, lui qui n'était resté sur ce tournage que pour ne pas décevoir son fils fan du jeu, il ne méritait sans doute pas tant d'honneur...

youli
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le 26 nov. 2011

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youli

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