«Taxi 5» débarque plus de onze ans après le quatrième opus dans les salles françaises et le résultat est plus que décevant. En effet, après toutes ces années, nous étions en droit d'en attendre beaucoup plus mais hélas le film choisit la voie de la facilité et des références gratuites plutôt que de nous proposer un scénario élaboré et compréhensible. Pourtant, et c'est assez contradictoire de dire ça, je pense que l'on peut trouver son compte en regardant ce film. Ce n'est pas désagréable à regarder, c'est plutôt drôle et bien joué et le film est assez divertissant pour ne pas être ennuyant. C'est une bonne comédie où on peut y rire volontiers mais malgré cela, le film laisse un souvenir mitigé tout simplement car ce n'est pas un film «Taxi» : il n'y a ni enquête policière, ni rebondissements et les scènes dans le taxi ne sont que très peu nombreuses, et c'est assez problématique de se retrouver face à cette absence d'éléments qui ont tant caractérisé la saga. On assiste donc à un déferlement d'humour, tantôt pittoresque, tantôt gênant, mais on en arrive à la conclusion que, malgré ses intentions, le genre de la comédie remplace trop les autres genres privilégiés à la saga, c'est-à-dire celui du policier et de l'action. On ne peut être contre le fait que Franck Gastambide, réalisateur du film, veuille faire quelque chose de nouveau et de se différencier des films précédents, mais le problème c'est qu'il ne semble jamais assumer ce qu'il fait en balançant assez grossièrement trop de références. Il en fallait pour que le film puisse exister mais on assiste là à un déferlement d'hommages, ce qui peut souligner de nombreuses questions quant à la capacité d'imagination de ce cinquième opus de la saga.


Hommage honnête ou manque d'inspiration? Telle est la première question que l'on peut se poser à la fin de la projection. Durant la première demi-heure, nous pouvons voir le film comme un hommage honnête et singulier. En effet, nous revoyons avec plaisir certaines personnages phares de la saga comme l'incommensurable commissaire Gibert, toujours fidèle au poste malgré un rôle plus minime cette fois-ci, ou encore un personnage moins connu mais également sympathique : Alain Trésor. Le problème c'est que le film ne semble jamais se détacher du passé : plus il avançait et plus il enchaînait les «références» presque gratuitement, jusqu'à même montrer des scènes entières de la saga, reprendre jusqu'à la moindre petite blague, la moindre cascade ou encore même modéliser les premiers taxis des deux premiers films de la saga en miniature. Nous pouvons voir cela comme du fan service, après tout pourquoi pas, même s'il y a tout de même un peu trop de références pour un reboot qui veut faire du neuf.


Malheureusement, même en répondant à cette question, la déception ne s'arrête pas là. Lorsque l'on va voir un film «Taxi», ce n'est ni pour l'élaboration du scénario ni pour l'élégance de l'humour : on y va en grande partie pour y voir de belles cascades et des scènes d'action impressionnantes... mais même ça le film ne réussit pas : un comble pour un film d'action! Le taxi est rangé sur le côté au profit de l'humour et n'est en aucun cas au cœur de l'action : effectivement, seules trois scènes se font à bord du taxi. La première est plutôt pas mal sur certains aspects mais le problème est qu'elle ne dure pas assez longtemps pour se faire un réel avis sur la réapparition du taxi. De plus, cette scène est très mal montée, elle toujours coupée par des scènes de dialogues inintéressantes et interminables ce qui empêche une immersion correcte dans la scène. La deuxième se déroule sur un circuit automobile, elle est plus réussie que la précédente mais est copiée sur le premier volet de la saga où l'ancien duo rendait visite aux antagonistes du film. Enfin, la troisième et dernière scène où nous verrons le taxi en action, est très bonne et propose une immersion bien plus vive que la première. Nous regretterons simplement le fait que deux de ces scènes ne se déroulent pas à Marseille alors que la cité marseillaise est censée être la ville phare de l'intrigue, ainsi que quelques effets spéciaux un peu grossiers.


Du côté des personnages, c'est de ce côté là très nuancé : on a aussi bien affaire à de bons personnages qu'à de mauvais. Tout d'abord, il y a le nouveau duo, composé d'un «Franck Gastambide» en forme et d'un «Malik Bentalha» investi et beaucoup plus appréciable qu'auparavant, est attachant et les deux acteurs se complètent assez bien pour qu'ils attirent notre sympathie. Ils arrivent à nous fait rire et nous prenons plaisir à rire avec eux. Il y a toutefois quelques petites choses à redire sur ces personnages comme, par exemple, le fait que le personnage de Malik Bentalha, Eddy Maklouf, soit beaucoup trop traître et menteur dans le film pour que cela puisse paraître crédible, ainsi que le fait que le personnage de Franck Gastambide, Sylvain Marot, cumule les rôles de chauffeur et policier et accepte tout de même d'être secondé par Eddy Maklouf, une réelle bille sans intérêt pour le policier. Sylvain lui doit le taxi pour coffrer les antagonistes, certes, mais avouons-le, c'est plus une excuse qu'un réel argument. Concernant les antagonistes, nous ne pouvons, malheureusement, qu'être catégorique sur leur traitement : ils sont indignes de la saga. Là où dans les précédents films les méchants constituaient une part essentielle dans la réussite des précédents volets, les Italiens, eux, ne font que de la figuration dans les quelques scènes où ils apparaissent et ne possèdent que deux expressions faciales! Ils sont mauvais et dénués de tout charisme, ce qui rend leur seule scène de braquage en début de film très gênante. C'est une énorme déception à ce niveau, tant la promotion insistait sur le talent de Salvatore Esposito, star de la série «Gomorra», très appréciée du réalisateur, alors que ce n'est que de la poudre aux yeux. Ce qui est sûr, c'est qu'ils ne laisseront aucun souvenir dans la saga.
Enfin, pour conclure, un petit mot sur les autres personnages : Samia, interprétée par Sabrina Ouazani, n'est pas énormément crédible en mécanicienne chevronnée : elle connaît le taxi mieux que personne et nous sommes censés trouvé cela crédible ? Même à distance elle sait gérer le taxi mieux que le conducteur lui-même ! Ensuite, la nouvelle police municipale est globalement sympathique, ils nous font rire et c'est bien là le principal, même si la composition de l'équipe est un peu trop clichée : nous n'échappons pas aux stéréotypes sur la grosse, le nain, le fou et le charmeur. Bien évidemment, leurs rôles donneront naissance à de multiples moqueries et malgré que ce type d'humour soit très facile, il peut tout de même faire mouche. Enfin, nous pouvons qu'être déçu également du traitement du commissaire Gibert, bien trop tourné au ridicule pitoyable. Il a toujours été ridicule mais pas de cette manière-ci. Ils ont quand même osé lui confier la présentation de la voiture KK-2000, la ramasseuse de déjections canines : c'est dire à quel point ils ne respectent pas le personnage de Bernard Farcy ! Encore heureux qu'il soit drôle sur le peu de fois qu'il apparaît... La charge de son rôle est également assez confuse : dans ce cinquième film, le commissaire est devenu maire et pourtant il vient missionner la police municipale de l'affaire des braqueurs italiens. Ne serait-ce pas à la police nationale de s'en occuper ? Et pourquoi est-ce lui qui vient leur donner la charge de l'enquête policière ? Son rôle est tout de même trop confus.


Pour finir, l'enquête policière : elle est inexistante. C'est l'adjectif qui résume au mieux ce que représente l'enquête policière dans ce film : le néant. Les autres films faisaient l'effort, au moins, de proposer un minimum de suspense et de rebondissements. Mais là non, c'est plat, il n'y a aucun suspense dans l'avancée de l'enquête, les indices sont livrés sur un plateau d'argent, bref c'est mauvais. Dans le premier film, par exemple, Daniel analysait les pots d'échappement des Mercedes et arrivait à déterminer qui équipait les voitures des antagonistes. Or ici, le duo comique s'infiltre dans une soirée organisée par les antagonistes et trouvent, en s'aventurant dans le bureau secret des Italiens, un dossier tout prêt, posé en plein milieu du meuble, contenant les photos du bijou que les méchants s'apprêtent à voler... Sérieusement ? Gastambide et Besson auraient quand même pu se fouler un peu plus sur le scénario, élaborer une enquête policière tangible et proposer un autre final que celui proposé, qui est d'une facilité déconcertante pour le duo principal...


En conclusion, «Taxi 5», c'est un peu la suite de «Pattaya», chef d'œuvre du mauvais goût du même réalisateur, interprété par la même bande (Gastambide et Bentalha en font parti, oui) et vient conclure, en quelques sortes, la trilogie débutée en 2012 par «Les Kaïra», autre film du réalisateur. Même type d'humour, même acteurs, même réalisateur : peu de choses ont changé. Fort heureusement, «Taxi 5» s'améliore à bien des niveaux et c'est tant mieux, grâce au budget très probablement trois fois plus élevé, Gastambide a pu s'amuser un peu plus et ainsi améliorer sa mise en scène des acteurs, ce qui fait que l'humour fonctionne mieux, même si c'est presque le même qu'avant et qu'il est parfois trop ridicule voire même pitoyable (les blagues vomi-caca et les moqueries... ça va deux minutes). Personnellement, je ne sais toujours pas quoi penser de «Taxi 5», partagé entre le fait d'avoir globalement passé un bon moment et le fait d'être déçu de voir toute l'essence d'une saga que j'apprécie disparaître...


10/20

Mick1048
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le 9 avr. 2018

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