Attention le spoiler signal illumine le ciel de cette critique, si vous n’avez pas vu le film prenez garde car à la lecture de ce qui suit le spoiler vous guète dans l’ombre et pourrait bien faire de vous sa prochaine victime…


Je crois que la réussite de ce film peut être résumée dans la scène d’introduction de son personnage principal. Après une scène de meurtre magistralement filmée on découvre Gotham accompagné par la voix calme d’un Batman qui fait le rapport de sa nuit, et pourtant on ne le voit nulle part, on entend le justicier mais on ne voit que le point de vue des criminels, on s’attend à le voir surgir du moindre coin d’ombre, on appréhende sa venue alors que son thème musical va crescendo, et lorsqu’enfin il apparait on découvre un Batman plus violent que jamais. Ici il n'est plus question de simplement donner les coups nécessaires pour l’emporter comme chez Nolan mais on assite bien à un déferlement de haine, à une pure vengeance. Après cette scène j’étais déjà conquis car jamais Batam n’avait si bien incarné la peur au cinéma, jamais on ne l’avait senti si motivé par la vengeance.


Et c’est là pour moi la plus grande réussite de ce film, Robert Pattinson incarne sous la caméra de Matt Reeves la meilleure version du Chevalier Noir. On ne se contente pas de nous dire qu’il incarne la peur, on nous le montre. Lors de cette scène d’introduction il semble vraiment être omniprésent dans les rues de Gotham, son symbole a dépassé sa simple condition d’humain (chose qui a toujours été primordiale dans les films de Nolan d’ailleurs mais là c’est encore mieux illustré par l’image). Et les scènes suivantes ne font que renforcer ce constat, la scène d’investigation sur le lieu du meurtre de la séquence d’introduction nous montre un Batman bien moins bavard que ses précédentes incarnations, il ne parle que pour aller à l’essentiel tout le reste se transmet par le charisme fou de Pattinson dans ce rôle. On y voit aussi son côté détective sur lequel le film mettra beaucoup l’emphase, cette scène contraste avec la violence de la précédente, on voit qu’il est aussi capable de penser de façon pragmatique et qu’il a un sens de l’observation et de la déduction très développé.


Enfin est mis en lumière son humanité lorsqu’il jette un regard plein de compassion et de tristesse à cet enfant qui a retrouvé son père mort chez lui. Ce simple jeu de regard m’a vraiment ému, je ne sais pas si le mérite est dû au film ou à mon attachement préalable à Batman du fait notamment de la trilogie de Nolan, des jeux Arkham et des quelques comics que j’ai lu mais en un plan on nous fait ressentir la motivation première de l’homme chauve-souris, une motivation qui remonte à un traumatisme d’enfance insurmontable. Et vient ensuite la première apparition de Bruce Wayne sans son masque, on y découvre un homme marqué par la fatigue, qui à peine rentré de sa nuit blanche se force à se remémorer la nuit passée. On voit qu’il se néglige, on ressent bien (notamment lors de sa discussion avec Alfred) que le Batman, la vengeance, est la seule chose qui l’anime. Il ne vit plus que pour ça et bien avant que le Riddler lui dise en fin de film on comprend que son masque est Bruce Wayne et que son vrai lui se révèle sous le visage de la chauve-souris. Chose qu’on avait de cesse de nous répéter dans la trilogie de Nolan et que pourtant les films n’avaient jamais réussi à me faire ressentir. Bref si je porte toujours la trilogie de Nolan (enfin surtout les 2 premiers) dans mon cœur pour ses très nombreuses qualités mais la mise en scène de ces films ne m’avait jamais aussi bien fait ressentir l’essence de Batman que le métrage de Reeves qui a parfaitement compris et mis en image la substantifique moelle du personnage.


De même que la ville de Gotham parfaitement capturé à l’image notamment grâce à la sublime photographie de Greig Fraser qui rappelle le chef d’œuvre qu’est le comics Batman : Un long Halloween pour mon plus grand bonheur. On retrouve toujours un travail du réalisme hérité de la trilogie de Nolan mais cette fois mêlé à une esthétique qui fait bien plus film noir et comics ce qui permet de créer une atmosphère plus pesante à Gotham, l’obscurité semble vraiment l’habiter et de même si on insiste toujours sur le côté humain du justicier il est aussi bien plus iconisé et incarne beaucoup plus les ténèbres que chez Nolan (même si la scène d’intro du Chevalier Noir dans Batman Begins reste un modèle en la matière). Le fait d’avoir tout de même gardé le cadre réaliste de l’univers de Batman sans créature fantastique et autres humain augmenté étais selon moi la meilleure chose à faire. S’il y une seule chose qu’on devait garder des films de Nolan c’est bien ça, revenir à ce qui fait le cœur de la lute de Batman, un héro humain comme celui-ci est bien plus intéressant quand ses problématiques, ses ennemis, ses péripéties et les thématiques abordé par elles sont à l’échelle humaine et transposables à notre monde. Par exemple je n’ai jamais trouvé Batman aussi inintéressant que dans Justice League où il combat une menace extraterrestre et réuni une équipe de super-héros (l’écriture désastreuse du film n’a pas dû aider cependant) car c’est bien le voir lutter pour sauver un Gotham gangrené par un crime et une corruption palpable qui est intéressant chez ce personnage.


Je l’ai évoqué plus tôt mais la bande son composée par Michael Giacchino est excellente. L’omniprésence du thème de Batman au sein du film renforce vraiment la présence de son aura de peur et de haine qui a imprégné tout Gotham (en accord donc avec la sublime scène d’introduction). Le thème du Riddler inspiré d’Ave Maria à la fois calme et inquiétant est lui aussi sublime et que dire du thème de Catwoman qui est juste parfait pour le personnage, tout en grâce, en légèreté mais aussi en sensualité rappelant l’inévitable jeu de séduction entre « The Bat and the Cat ».


The Batman ne fait pas penser à Un long Halloween que par sa patte visuelle mais aussi son schéma narratif tournant autour d’une enquête nous menant d’une scène de crime à une autre dont le premier à eu lieu à Halloween et qui mettra sous la lumière les sombres secrets de Gotham. Et ceci nous emmène inévitablement à parler du Riddler, un antagoniste de la chauve-souris dont j’ai longtemps attendu une adaptation au cinéma (dans un film sérieux) et qui est ici très bien interprété par Paul Dano. Mais plus que son interprétation c’est la manière dont il se confond avec Batman qui m’a plu avec cette vision subjective sur un appartement à travers les jumelles tantôt du Riddler puis du Batman, leur lutte motivée par la vengeance, leur repère à l’image de leur personnalité (la Batcave sombre, habitée par des chauve-souris avec du matériel de pointe pour enquêter et l’appartement du Riddler chaotique, débordant d’information et de cages de rat), le fait qu’ils tiennent un journal tenant compte de leur grand projet pour Gotham et enfin leur passé d’orphelin.


Cependant ce qui les sépare c’est leur classe sociale, Bruce Wayne a eu tous les moyens pour se relever et assouvir sa vengeance là où Edward Nashton ignoré par une ville qui n’avait que faire des démunis a dû se battre et réunir d’autres personnes dans son cas pour exécuter la sienne. Une vengeance inspirée par celle de Batman, une vengeance destructrice qui n’emmène rien de bon, quelque chose que Bruce Wayne n’a pas pu voir car il n’a jamais connu la sensation d’être la victime d’un système corrompu qui n’en a rien à foutre de son sort. Du haut de sa tour dorée il n’avait qu’une vision trop simpliste des choses et ne ce n’est pas rendu compte qu’il ne renvoyait pas le bon message, à trop inspirer la peur chez les criminels il a oublié d'inspirer l'espoir chez ceux qu’il est sensé sauver les amenant inévitablement à prendre les armes contre un système qui ne montre aucun intérêt envers eux.


C’est là que le rôle de Catwoman, jouée par Zoë Kravitz, est primordial, elle sera la passerelle entre les classes sociales inferieures et Batman. Participant aux crimes que combat le justicier ils finiront pourtant par s’allier puis par se comprendre brisant la vision trop simpliste des choses qu’avait Bruce Wayne. Selina Kyle est à mon sens celle qui inspire le plus Batman dans son changement de philosophie à la fin du film.


Bon apprès oui pour être honnête tout n’est pas parfait. La romance est emmenée un peu vite notamment, les monologues en voix off de Batman sont cools mais ils sur explicitent un peu trop le propos du film et puis vraiment j’ai trouvé la scène de teasing du Joker affreuse, parce que oui on va ENCORE avoir un Joker… Alors je ne juge pas avant d’avoir vu la suite s’il le faut il sera très bien ce Joker mais sérieux vous voulez pas vous renouveler un peu ? Enfin merde sortez nous des trucs nouveaux comme la cour de hiboux, ça pour le coup ça serait passionnant à adapter au cinéma. Et puis au-delà de ça la scène a la subtilité d’un camion benne (je m’excuse au près de tous les camions benne qui lisent cette critique) et est d’un ridicule consommé et d’un cliché affligeant ce qui fait tache dans un film comme celui-ci. Le dernier reproche qu’on pourrait faire c’est que finalement les thématiques abordées ne sont pas très neuves pour un Batman mais en même temps c’est pour ces thématiques que Batou est intéressant et puis la lutte des classes sociales est ici infiniment mieux abordée que dans The Dark Knight Rises où le niveau de bêtise de son traitement est assez affligeant.


Pour finir j’aimerais dire à quel point c’est plaisant de voir un blockbuster qui est une vraie proposition de cinéma, visuellement ambitieux et qui prend le temps de poser une ambiance notamment avec un montage lent et des plans qui durent (et personnellement je n’ai pas vu les 3h passer). En se sens les scènes d’action en sont un parfait exemple, parfaitement lisibles en évitant un montage sur découpée pour nous laisser apprécier les très belles chorégraphies, mention spéciale à la course poursuite qui est quand même assez folle. Bref ça fait plaisir de voir que le cinéma n’est pas totalement mort à Hollywood et que visiblement mon très cher Batou est entre de très bonnes mains pour les quelques années à venir.

LucasBorja
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le 17 mars 2022

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