The Killer
6.1
The Killer

Film de David Fincher (2023)

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Attention : David Fincher a laissé une IA réaliser son film !


Adapté de la BD française Le Tueur dont le premier cycle de 13 tomes fut publié entre 1998 et 2014, The Killer (2023) actualise le contexte de l’intrigue à la période 2020. Trois ans après la sortie de Mank, ce long-métrage est donc le deuxième film réalisé par David Fincher dans les années 2020 et sa réception reste forcément influencée par la connaissance que l’on a du reste de son œuvre.


Le premier constat qui m’est venu à l’esprit à la fin du visionnage c’est l’absence d’engagement émotionnel que j’ai pu ressentir.


Sur le plan narratif d’abord, il n’y a pour ainsi dire aucun relief. L’histoire progresse bien sagement à son train de sénateur, sans le moindre changement de rythme ni de direction. Pas le moindre flash-back pour piquer notre curiosité. Passé le premier chapitre, on sait qu’on est embarqué pour 2 heures dans un scénario qui n’a pas l’intention de sortir des rails qu’on nous énonce dès le départ.


Ensuite, il faut signaler le côté très lisse de ce « tueur ». C’est une sorte de synthèse des plus gros clichés de tueur à gage : il est taiseux, il a 50 alias tous parfaitement organisé, il a des planques partout, et il n’a besoin d’aucun complice. Si j’ai bien compris, cela fait partie de la caractéristique du tueur dans la BD. Mais bon, ça ne m’empêche pas de penser qu’il puisse s’agir d’un défaut une fois transposé à l’écran.


Sur le plan psychologique, les motivations du tueur à agir tel qu’il le fait sont balayées très succinctement. On aperçoit son épouse durant 1min 30 de film et on est censé en inférer que cet être froid, calculateur et apparemment sans empathie, a un lien fort et authentique avec cette femme. J’ai pensé pendant le film qu’il agissait de manière égoïste mais ce n’est pas non plus développé. En fait ce que je trouve gênant c’est la voix off omniprésente qui surgit à tout moment dans le film pour surligner ce qu’il se passe où ce qui devrait être suggéré par la mise en scène. Encore une fois, c’était un des ressorts dans la BD originale, mais quand il s’agit d’un film le montage et les actions des personnages devraient suffire à nous faire comprendre non seulement l’histoire mais également le sous-texte. Dans The Killer, la majorité passe par la voix-off. Ce qui contribue également à la monotonie du film c’est l’absence de conflit psychologique du personnage principale L’histoire de « The Killer » c’est l’histoire d’un type qui ne supporte pas d’avoir échouer et qui refuse de passer à autre chose, mais à aucun moment on ne perçoit ses doutes. On attend qu’à un moment il cède, que son personnage soit humanisé pour ressentir un peu d’empathie envers ce manipulateur robotique. A aucun moment sa vision du monde n’est vraiment remise en question. On peut écrire un personnage de la sorte : un type qui ne se pose jamais de question, qui va jusqu’au bout de son idée sans sourciller et sans rencontrer d’obstacle majeur. Aucun problème. Mais alors quel intérêt pour le spectateur ?


Enfin dernier point qui me paraît important de décrire, c’est ce qui concerne directement la forme du film. David Fincher nous a habitué à une mise en scène beaucoup plus minutieuse et prenante. Je me souviens encore de la scène de la cave dans Zodiac et ça fait 10 ans que je l’ai vue. Il n’y a pour ainsi dire aucune scène mémorable. Je garderai peut-être en mémoire la scène de bagarre au milieu du film qui est assez bien troussée, mais baignée au milieu de l’ensemble du film elle ne brille pas et passe comme un courant d’eau tiède avec le reste du film.


Finalement, The Killer est un film passable tant sur le plan scénaristico-psychologique que cinématographique (montage et mise en scène). Fincher semble absent de son propre film, ou en pilote automatique, son style est estompé au point de faire passer The Killer pour un film Netflix de moyenne facture. Il fait partie des déceptions de cette année 2023, comme à Christopher Nolan (Oppenheimer), Wes Anderson (Asteroid City), et Damien Chazelle (Babylon), mais à l’inverse de ces derniers qui nous imposent une version boursouflée et caricaturale de leur esthétique, Fincher dilue son style au point de rendre son film oubliable. Mais il en est ainsi : c’est souvent envers les artistes les plus talentueux qu’on est le plus exigeant.

Quentin_Pilette
5
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le 14 nov. 2023

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