Le monde du Kung Fu "old school" est un univers bien plus riche que ce que les éditeurs Français veulent bien en montrer. Trop souvent, le genre est réduit aux seules œuvres, certes excellentes, de Lau Kar Leung, Samo Hung ou Yuen Woo Ping et le reste, nonchalamment balancé dans la rubrique « nanars ». Triste constat qui est heureusement contredit par l'abondance de petites réussites, des films comme Dragon's Claws ou Two On The Road. The Master Strikes fait partie de la même catégorie, un film d'exploitation rempli de défauts mais aussi de qualités.

Kung Fu Comédie d'exploitation oblige, le scénario est un amalgame des grands succès qui ont fait la gloire du genre. On retrouve donc ce bon vieux mendiant So (immortalisé par Simon Yuen dans Drunken Master), un duo d'amis escrocs (Knockabout), les séquences de recherche du maître et d'apprentissage martial (constante du genre même si son importance décroît inexorablement avec le temps) et divers lieux incontournables (la maison de passe remplie de tronches pas possibles, le casino propice aux arnaques et aux combats).
Et comme la plupart des films surfant sur la vague initiée par Snake In The Eagle's Shadow, The Master Strikes présente les faiblesses habituelles : Manque de charisme des acteurs principaux, séquences comiques pachydermiques et répétitives... La réalisatrice/scénariste, Kao Pao Shu, fait même moins bien que ses petits camarades dans la gestion de son scénario. Mélangeant une intrigue basée sur les agissements du grand méchant et une autre sur la recherche du profit des deux héros, le lien entre les deux est laborieux et certains personnages inutiles (qu'apporte Eddie Ko ?).
La seule véritable innovation que The Master Strikes a à offrir, c'est le personnage du convoyeur fou interprété par Casanova Wong. L'acteur Coréen ne maîtrisant pas le cantonais, il écopait généralement de rôles sérieux pour lesquels il n'avait pas à fournir de grosses performances d'acteur. Un visage concentré faisait souvent l'affaire. Ici, Casanova a enfin l'opportunité de jouer un rôle comique et le bougre s'en donne à cœur joie : Grimaces débridées et regards hallucinés se succèdent, ponctués par des cris stridents. Pas vraiment une interprétation de la folie méritant un prix du meilleur acteur dramatique mais il faut avouer que son énergie arrache des sourires à plus d'une occasion. Il faut le voir, par exemple, quand il intimide une vieille prostituée en prenant des poses martiales parodiques avec ses mimiques de guignol ! Tout simplement imparable.

Et bien sur, il y a l'action. Est-ce une surprise si elle est excellente ? Pas vraiment, la présence de Ching Siu Tung et Tony Leung Siu Hung aux chorégraphies ne pouvait que donner des étincelles. Précisons d'ailleurs qu'aucun câble n'est de la partie, Siu Tung n'avait pas encore trouvé son style si personnel à cette époque. A la place, on a droit à des combats près du sol, nerveux et techniques. Comme souvent avec les longs métrages estampillés "old school", la qualité des affrontements dépend beaucoup des capacités physiques de leurs interprètes. On ne s'étonnera donc pas que les chorégraphies les plus faibles soient celles avec Eddie Ko. Mais, c'est la marque des plus grands, même avec des artistes martiaux moyens comme l'acteur au regard de tueur, ils parviennent à livrer une scène d'action correcte. Évidemment, quand ce sont des artistes martiaux de la trempe de Yen Shi Kwan, Casanova Wong ou Meng Yuen Man qui s'y collent, le résultat est superbe. Le final, tout particulièrement, est un condensé de virtuosité : Les plans sont longs, les coups puissants et précis, le rythme intense... Du haut niveau de chorégraphie et d'exécution.

The Master Strikes n'est pas un « masterpiece » mais, en tant que comédie Kung Fu d'exploitation, c'est une œuvre solide qui délivre la quantité d'action et d'humour attendue.

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le 28 févr. 2011

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Palplathune

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