Toy Story
7.7
Toy Story

Long-métrage d'animation de John Lasseter (1995)

Woody would peck her (Critique en service commandé pour SeigneurAo #04)

Aujourd'hui, j'ai envie de me faire des amis. Et quoi de mieux pour ça que de critiquer un film porté au nues par toute une génération de fans zélés ?

Commençons déjà par les points forts de ce film (histoire d'amadouer les dits zélés fans).
On a beau prêter aux films estampillés Pixar une double lecture et un propos souvent plus " adulte " qu'il n'en a l'air (soit dit en passant s'il n'a pas l'air adulte à première vue c'est peut être justement parce qu'il ne l'est pas vraiment, se contentant peut être juste d'être un peu moins puéril et infantilisant que ses concurrents directs...), ça ne m'a jamais plus frappé que ça. Toy Story fait du coup figure d'exception avec un univers pour le coup vraiment sombre et plutôt effrayant (pour une production jeunesse, je précise !) et des thèmes abordés assez intéressants.
Un héros paradoxalement lâche, arrogant, autoritaire et prêt à tout pour garder sa place de jouet préféré, des sujets tels que la justice sommaire mais aussi la traîtrise (de la part du héros !!!), des jouets composites monstrueux... Toy Story par bien des aspects sort du lot, c'est certain.

C'est malheureusement à peu près tout et bien vite Woody redevient un héros bien pensant et repentant. Buzz est quant à lui rapidement lourdingue et les autres personnages bien que globalement attachants sont trop nombreux pour être réellement fouillés.
Tout cela est un poil dérangeant mais ce n'est rien toutefois face à la véritable tare de ce film : l'animation. Rajoutant sans conteste à l’ambiance cauchemardesque du métrage (et le clin d’œil appuyé de la moquette Overlook chez Sid n'arrivera jamais à me faire croire que l'effet est voulu tout le long), l'animation n'est jamais loin de ce que j'ai pu voir de pire en la matière. En plus de décors figés aux perspectives étranges (bien que très certainement rigoureusement exactes), les personnages eux même, par des mouvements toujours un poil saccadés et artificiel participent à l'atmosphère d'étrangeté et de malaise ambiant qui sourd de chaque minute de ce film. Les personnages humains, pourtant toujours très laids dans les suites sont ici de véritables caricatures d'êtres humains et on ne saurait dire lequel fait plus peur, de la sœur de Sid à Andy et sa famille, si Sid lui même ne remportait la palme haut la main avec sa coupe de balais brosse et son rictus d'un autre monde. Je passerait volontairement sous silence l'abomination numérique qui sert de chien à Sid mais sachez que je n'en pense pas moins.
Je vous vois déjà (passé la suffocation due à l'indignation qu'a suscité chez vous la lecture de ces quelques lignes) vous écrier quelque chose comme «  nan mais [insérez ici une insulte de votre cru], faut quand même remettre les choses dans leur contexte : c'est un des premiers films d'animation en images de synthèses, c'est super bien fait pour l'époque ! Tu serais pas capable de faire ne serais ce qu'à moitié aussi bien alors ta bouche ! ».
Autant vous dire que de telles justifications ne me conviennent pas du tout. Ok l'animation numérique était à l'époque balbutiante mais pourquoi dans ce cas vouloir en faire un long métrage ? L'animation traditionnelle, elle, était alors si ce n'est à son apogée (elle avait selon moi déjà amorcé son déclin, numérique oblige, mais ce n'est pas le propos) du moins à un stade permettant tout à fait d'envisager un tel projet. Il est souvent très intéressant d'essayer d'adapter son médium à l'histoire que l'on veut raconter mais la réciproque n'est selon moi pas envisageable, surtout si c'est, comme c'est le cas ici, au détriment du résultat final.
[Edit : Après lecture de certains commentaires je me rend compte que je me suis mal exprimé ici : je trouve dommage d'avoir un peu " gâché " une histoire au demeurant sympathique par un traitement aussi sommaire. Après je comprend bien qu'il faille commencer par quelque chose (on m'a par exemple cité l'Arroseur arrosé) mais autant dans ce cas peaufiner la technique sur un format plus court par ailleurs plus propice aux expérimentations, tant graphiques que scénaristiques ? Après je comprend bien qu'il faille commencer par quelque chose et que justement si l'histoire avait été moins intéressante ça aurait fait un four et l'histoire de l'animation en images de synthèses en aurait certainement été tout autre mais je ne peux m’empêcher de trouver ça dommage...]
Quant à l'argument du « tant que t'es pas capable d'en faire autant t'as rien à dire » je me contenterait de répliquer que ce n'est pas parce que je n'ai jamais fait de mousse au chocolat que je ne peux pas dire si elle me reste sur l'estomac.

Alors oui, peut être suis je un peu sévère, peut être ce Toy Story mérite t'il plus que ce petit 6 mais je ne peux m’empêcher de le tenir responsable de tous les mauvais films d'animation en images de synthèses qui ont depuis fleuri sur nos écrans. Et puis je l'ai très certainement vu trop tard, les épisodes 2 et 3, de loin plus aboutis (même s'ils ne sont toujours pas exempts de quelques défauts) sont passés par là avant que je ne le découvre et ça n'a certainement pas adouci mon jugement, mais je pense que la faute en revient surtout à tous ces fans qui (comme vous, certainement) m'ont chanté des années durant les louanges de ce gentil petit film d'animation un peu moche, un peu loupé mais finalement attachant...

Je crois qu'encore une fois j'en attendait un peu trop.
Thieuthefirst
6
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Créée

le 9 juin 2013

Modifiée

le 9 juin 2013

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Thieuthefirst

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