« Une année, un film » : Trois Sublimes Canailles, John Ford, 1926.

Après avoir découvert John Ford, pionnier du western, avec « A l’assaut du boulevard », réalisé en 1917, j’avais inscrit Trois Sublimes Canailles dans ma liste des films à regarder dans mon voyage à travers l’histoire du cinéma. Nommé « Three Bad Men », ce vieux western s’annonçait d’emblée comme un film intéressant, bien que je me permettais d’émettre quelques doutes quant à la traduction française du titre que je croyais encore sortie de quelques esprits délirants et pas très raisonnés. Je tiens d’ailleurs à prévenir que le tout dernier paragraphe de cet article contient un spoiler majeur concernant la fin du film, donc si vous comptez un jour le regarder, ne descendez pas trop vite !

Le film démarre d’une manière des plus simples. Nous sommes plongés en pleine ruée vers l’or, et nous suivons un convoi qui fait route vers le Dakota, où de nouvelles terres riches en gisements du précieux métal ont été découvertes. Nous allons vite faire connaissance avec Miss Lee Carlton et Dan O’Malley, nous faisant rapidement imaginer une romance comme on en a vu tant d’autres. Mais là vous me poserez la bonne question : « pourquoi trois canailles » ? J’allais y venir, pas de précipitation… Les trois canailles vont faire leur apparition à travers des affiches annonçant une prime sur leur arrestation pour des affaires de vols. Les trois crapules, dénommées « Bull » Stanley, Mike Costigan et « Spade » Allen vont finir par faire la rencontre de la demoiselle, et ne pas s’avérer être que de simple crapules, car ils vont rapidement s’opposer au peu scrupuleux Shériff Layne Hunter.

Sans en dire plus sur ce film, je peux dire que l’on tient là un petit bijou d’innovation et de fraîcheur. Ce n’est pas un film linéaire ou cliché, on se laisse aisément surprendre par les divers rebondissements qui alimentent l’intrigue. De plus, le film tient sa force de son authenticité et de sa fougue, notamment grâce à des acteurs incroyablement naturels et attachants. Je me suis laissé prendre au jeu et ai été surpris par l’aspect très moderne de ce film, qui a dû en inspirer plus d’un. Ces trois canailles forment un trio décapant et héroïque, à l’opposé de leur apparence de vieux loubards usés par l’expérience et l’alcool.

J’en viens donc au SPOILER. Je préfère l’écrire en majuscule afin qu’il soit bien lisible et que vous ne le lisiez pas. Au fond, ce n’est pas dramatique si vous allez jusqu’au bout de ce paragraphe, mais vous perdrez un important effet de surprise, tant sur l’histoire elle-même que sur l’aspect avant-gardiste de ce film qui se permet de briser quelques codes. Vous êtes toujours là ? Alors allons-y. Je souhaitais simplement revenir sur la fin qui transforme nos trois canailles tout court en trois « sublimes » canailles. En effet, les vingt dernières minutes suivent la course vers l’or du convoi, et la traque des trois canailles par le vilain shérif. Afin de gagner du temps, et de sauver Miss Lee Carlton et Dan O’Malley, les trois vieux briscards décident de s’arrêter à tour de rôle sur le chemin, et se sacrifient à tour de rôle jusqu’à ce que « Bull », le dernier survivant, descende le Shériff avant de mourir. C’est ainsi que nos trois canailles se subliment, et donnent une tournure émouvante et inattendue pour un film d’époque, avec magnifique une scène de fermeture, clin d’œil évident à l’une des premières scènes du film.

En somme, nous avons avec Trois Sublimes Canailles une nouvelle pépite du cinéma muet, alors que nous approchons inlassablement de la fin de cette ère silencieuse.

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le 16 déc. 2014

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