Une femme coréenne (2003) - 바람난 가족 / 104 min.
Réalisateur : Im Sang-Soo – 임상수.
Acteurs principaux : Moon So-Ri – 문소리 ; Hwang Jung-Min – 황정민 ; Bong Tae-Gyu – 봉태규 ; Yoon Yeo-Jeong – 윤여정 ; Baek Jeong-Rim – 백정림.
Mots-clefs : Corée ; Drame ; Sexualité.


Le pitch :
L'histoire d'une ancienne danseuse mariée à un avocat de renom infidèle. Femme au foyer, elle décide de sortir de sa torpeur quotidienne en cédant aux charmes de son jeune voisin, un adolescent timide.


Premières impressions :
Dans la vie on naît, on grandit, on se trouve un conjoint, on le trompe, on a quelques orgasmes et quelques drames et à la fin on meurt. Voilà qui pourrait servir de pitch au troisième film d’Im Sang-Soo (The President's Last Bang ; L'Ivresse de l'argent) dont le début de carrière se concentra décidemment sur la sexualité féminine. Après « Girls' Night Out » (1998) qui mettait la focale sur la sexualité de trois jeunes femmes en quête de liberté, le réalisateur remet le couvert pour s’intéresser à l’intimité des femmes mariées au travers de « Une femme coréenne », un film transgressif qui aborde la question du plaisir à tout âge dans une Corée tout juste démocratisée.


Si je ne suis pas un grand fan des récents films de Im Sang-Soo, je dois reconnaître que les films de « jeunesse » du réalisateur savent attiser ma curiosité. En général dans le cinéma coréen, les représentantes du beau sexe font bien trop souvent office de belle plante à protéger ou à conquérir, la femme idéale se devant d’être belle, sexy, mais « pure ». Les personnages féminins de « Une femme coréenne» sont tout l’inverse de ce fantasme de cinéma. Ici les femmes assument leurs désirs tabous, prennent en main leurs vies sexuelles et affectives et se débarrassent du patriarcat dominateur en Corée. Mieux ! En vraies héroïnes, les femmes peuvent pour une fois se planter et plus encore, assumer de se planter sans qu’un cowboy sauce Kimchi ne vienne les relever.


Cette libération de la femme est rendue possible par deux choix très forts du réalisateur, celui de l’absence de doute et de non-dit, ainsi que l’usage d’une inflexible logique de conséquences aux actes entrepris. Ainsi, durant tout son film, Im Sang-Soo n’aura de cesse de nous rappeler que la liberté, qu’elle fusse de boire ou de jouir, ne peut se faire sans conséquences lourdes qu’il faut savoir assumer. Malheureusement, si ce parti pris fait la force du film, le mauvais dosage du drame associé aux conséquences en est la principale faiblesse. La systématisation des conséquences rendent celles-ci trop irréalistes, limite grotesques, et brouille en partie le message du film, comme si le réalisateur n’avait pu se défaire d’une certaine forme d’excentricité et de fatalisme que l’on trouve si souvent dans le cinéma du pays.


Si je regrette quelques choix de scénario, je dois dire que la qualité du jeu et de la mise en scène a largement fait passer cette déception au second plan. Alors que la sexualité est omniprésente (j’ai rarement vu autant de scènes de nu dans un film coréen), Im Sang-Soo ne tombe jamais dans l’obscène ou dans la vulgarité d’un ébat rince l’œil. Cette justesse tient à la fois à la mise en scène, au jeu des acteurs, mais aussi au choix de montrer des corps réalistes, imparfaits, au choix de filmer le grotesque des ébats et les plaisirs minables tout juste arrachés tout autant que la beauté et la sensualité des relations amoureuses. Surtout, il faut célébrer les acteurs, Moon So-Ri plus encore que les autres, pour la finesse de leur jeu et le naturel qu’ils dégagent malgré des situations parfois irréelles.


Pour conclure, malgré une gestion des conséquences qui m’ont un peu gâché la fin du film, Une femme coréenne m’a réconcilié avec le cinéma de Im Sang-Soo duquel je m’étais lassé depuis mon visionnage de The President’s last bang (un film qui retrace l’assassinat de l’ancien dictateur Park Chung-Hee, père de l’ex présidente Park Geun-Hye). Un film avec des défauts donc, mais qui dit quelque chose de son époque et qui ne cherche pas à éblouir le spectateur avec des effets de caméra inutiles. En bref, un film qui vient se classer dans le haut du panier et dans lequel je me replongerai avec enthousiasme d’ici quelques années.

Créée

le 6 déc. 2017

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