Si certaines scènes étaient marquées au fer rouge dans ma mémoire défaillante, force est de constater que j'avais oublié le nihilisme exacerbé du film, le gout de cendre dans bouche que laisse le premier film de Kitano en tant que réalisateur.

Un humour pince sans rire traverse le film, mais n'allège en rien la violence sans concession de ce dernier, ni le désespoir ambiant.
Le personnage de Kitano évoque autant Maurizio Merli dans Rome Violente que Harvey Keitel dans Bad Lieutenant, avec, à l'évidence, une double dose de Eastwood, le silence de l'homme sans nom, et les méthodes de Dirty Harry (qui fait malgré tout pâle figure face au caractère brut de décoffrage de Beat Takashi).
L'univers dans lequel le film se déroule est sans pitié, la jeunesse est cruelle, la police oscille entre corruption, m'enfoutisme et méthodes extrêmes.
Débordements continus, absence quasi totale de conséquences, tant pour les exactions policières que pour celles des criminels, on n'est vraiment pas loin de ces films des années 70 italiens, où un flic décidait que la police avait les poings liés, et justifiait tous ses débordements par cet argument, entre anarchisme guerrier et fascisme milicien.
Les questionnements éthiques d'un Bronson dans le premier Un Justicier dans la Ville, ses hésitations n'ont pas leur place ici.
Kitano est happé par le déferlement de ses propres actions et décisions, pris dans une fuite en avant allant droit dans le mur.

Je me souviens, au cinéma, des gloussements au début de l'interrogatoire dans les toilettes, Kitano se contentant de gifler son coupable désigné. Ils ne durèrent pas bien longtemps.

Malgré les références (voulues ou non), ce film est personnel, viscéral.
Et jamais Kitano ne sombre dans l'autojustification, dans la volonté d'absoudre son personnage, et ne montre aucune indulgence vis à vis de ce dernier, ce qui est assez rare pour être noté.
La gratuité est assumée, elle a sa place dans cet univers sombre et violent, amoral. Elle est de l'ordre du fait, tout comme l'existence des personnages.

Et comme je reste souvent plein de doute face aux ralentis, lorsque j'en remarque un qui est plus que justifié, qui participe à la magie d'une scène, je le signale systématiquement.
Il me semble qu'il n'y en a qu'un ici, mais vous ne l'oublierez certainement pas de sitôt.

toma_uberwenig
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le 14 mai 2011

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toma Uberwenig

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