Voilà une tache plus que compliquée, écrire sur Volver, film du talentueux Pedro Almodovar. Je ne prétend pas avoir la science infuse, son oeuvre est d'une complexité et d'une précision extraordinaire, je le revendique.

Almodovar nous présente donc un film où les femmes maitrisent le monde, au travers du ménage, de l'éducation des enfants, du travail et des double emplois, et de la gestion de nombreux problèmes. “Des trucs de bonnes femmes”, comme le dit si bien Raimunda, interprétée par la merveilleuse Penelope Cruz. En effet, ce film est bel et bien un truc de bonne femme. Entre la soeur (Solé), Paula (la défunte tante), la mère, et Paula (la fille de Raimunda), les hommes n'ont définitivement pas leur place. Et pour preuve, la seule marque masculine est marquée par l'équipe de tournage pour laquelle Raimunda s'improvisera restauratrice, qui sont de passage; le patron du restaurant dans laquelle elle les accueille, qu'on ne voit que lorsqu'il prévient Raimunda qu'il s'en va; et Paco, le mari de Raimunda, tué par sa fille lorsqu'il a tenté de la violer. Les femmes restent donc entre elles, et c'est bien mieux comme ça.

Le passé est le thème phare de ce film. Le titre “Volver”, signifiant “revenir”, “retour”, illustre bien les allés retour temporels du film, autant marqués par la présence concrète de la mère pensée morte, que des souvenirs remémorés. Agustina, la voisine de la tante Paula, parle sur son lit de mort de l'histoire de ce lit, c'est là qu'elle est née, que Paula a été veillée, on parle de secrets qui les hantent toutes et qui seront à un moment donné démasqués. Et c'est par vague que le passé revient, s'entrechoquant avec le présent. L'acharnement d'Agustina de découvrir ce qui est arrivé à sa mère qu'elle pense disparue, se lie étroitement avec la mort des parents de Raimunda et de Sole jusqu'à ce que les deux interrogations trouvent toute les deux un point final dans une vérité qu'on ne redoutait pas. L'aveux mal venu de Paco auprès de Paula, lui disant qu'il n'est pas son père afin de justifier qu'il ait envie d'elle fini par trouver également un point final lorsqu'on découvre que Raimunda a été violé par son père, engendrant ainsi sa fille, il est alors difficile de ne pas se souvenir de ses larmes lorsque Paula lui raconte les détails de la tentative de viol. J'oublies certainement des éléments, mais je trouve ces deux-ci assez pertinents pour montrer l'intelligence du scenario.
La mort fait partie intégrante de ce film, elle hante les personnages sans cesse, comme un nuage prêt à faire éclater sur elles une pluie déferlante. Agustina, dont un cancer vient d'être pronostiqué, cherche la vérité sur la disparition de sa mère, qu'elle ignore décédée à ce moment-là, Raimunda vit avec le poids du cadavre de son mari qu'elle a caché dans un congélateur, assassiné par sa fille car il a tenté de la violer, Solé vit avec le secret que sa mère n'est en réalité pas morte, tout en la cachant chez elle, sans oublier cet incroyable vent du nord, qui selon les légendes rend les gens fous. Ce thème noir vole au dessus des personnages qui gardent cependant toute leur vivacités, on pensera évidemment à Penelope Cruz qui prend à bras le corps tous les problèmes qui se posent devant elle, notamment prendre un autre emploi le dimanche lorsque son mari perd son travail. La règle est ici de trouver rapidement une solution, quelque soit le problème.

Il y a aussi l'importance de la couleur rouge. Ce rouge à l'espagnol. Ne représentant pas simplement le sang qu'elle ont un peu toutes sur les mains, il illustre la passion de la vie qu'elles ont malgré tout, l'amour qui reste également plus que présent.

Ce film est tellement riche,( esthetiquement, en terme de reference (on pensera au film de Luchino Visconti, Bellissima qui est visionné par la mère), les acteurs sont excellents, …) qu'il est difficile de tout coucher sur une critique, tant de choses peuvent nous en échapper...
Quoi qu'il en soit, je suis conquise.
MLJane
10
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le 16 juin 2014

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Jane L

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