C'est toujours plus facile de descendre un film que d'en encenser un. Pourtant Wall-E m'a suffisamment convaincu pour que je m'essaye à ce difficile exercice.
Commençons par le commencement : le film raconte l'histoire d'un petit robot nommé Wall-E, resté sur la Terre pour la nettoyer, pendant que ce qui reste de l'humanité a fui la catastrophe écologique qu'elle avait déclenchée. Wall-E remplit sa mission petit à petit, mais il est seul et il semble ne jamais pouvoir y parvenir tant la tache est grande. Ce triste quotidien se poursuit jusqu'au jour où l'arrivée de Eve, un autre robot, lui impose de choisir entre son travail et son rêve. Le film devient alors l'histoire d'un petit robot, peu vif (Wall-E est très humanisé, notamment via le mouvement de ses yeux, rappelant un peu celui des ailes sur le casque d'Astérix) et très maladroit, partant vers les étoiles pour suivre Eve, seule "personne" à avoir amené du piment et de l'intérêt à sa vie de robot solitaire..
On a donc affaire à un scénario somme toute assez banal, bien qu'assez modernisé : le gentil amoureux peu dégourdi et la beauté fatale lui faisant tourner la tête sont ici deux robots partagés entre leur mission et leurs sentiments. Mais ce scénario banal est incroyablement embelli par quelques éléments.
A travers lui, plusieurs thèmes sont abordés : l'écologie, le rapport à la nature, la sur-consommation, l'influence des machines sur l'humanité et d'autres encore. Bien entendu, ils ne sont qu'effleurés, mais je trouve ça fantastique et indispensable que de tels thèmes soient présents dans un film avant tout destiné aux enfants.
Point suivant : le personnage de Wall-E est incroyablement attachant. Le début du film consiste à suivre jour après jour son quotidien morne, magnifique parodie du métro, boulot, dodo humain. Wall-E n'est qu'une minuscule partie d'un engrenage qui s'est écroulé autour de lui, le laissant seul face à sa tache, mais, programmé pour, il continue malgré le côté saugrenu de sa situation, tel un ouvrier dont l'usine aurait fermé depuis bien longtemps mais qui continuerais à s'y rendre chaque jour. Il collectionne les objets abandonnés par les humains et une chose plus que tout le fait tenir et rêver : une vieille cassette comportant les chansons Put on your sunday clothes et It only takes a moment du film Hello, Dolly!. C'est notamment avec cet élément que l'on comprend que Wall-E, en plus d'être humanisé par le réalisateur, ressent finalement des sentiments proprement humains. Et toute cette métaphore de l'humain se cachant chez le robot, de l'envie prenant le pas sur l'obligation ou encore de la vie prenant le pas sur la routine, l'ennui et la solitude est superbement bien rendue au travers de ce petit personnage chantant comme il le peut dans sa cabane.
En parlant de musique (transition de qualité), la bande originale de Wall-E est selon moi un autre point à souligner. La musique d'ambiance du film est globalement douce, épurée et sert au mieux les situations. Quant à l'utilisation de chansons évocatrices de la belle époque (notamment les deux citées plus hauts) ou des années folles (on retrouve des chansons d'Edith Piaf), elle nous ramène vers une humanité heureuse et belle, sans aucun doute plus fantasmée que réelle, et ce avant de nous ramener vers la réalité via la découverte par Wall-E de ce à quoi ressemble l'humanité à son époque. Ce choix musical ne fait que renforcer l'apparition de l'idée d'une régression de l'Homme et de la nécessité d'une reprise en main. et est incroyablement bien rendu, que l'on adhère ou non à l'idée.
Cette idée est également renforcée par la différence de perception visuelle entre l'humanité rêvée, que nous voyons à travers les yeux de Wall-E sous la forme des acteurs réels du film de sa cassette, et l'humanité qu'il va rencontrer, que le spectateur ne voit qu'en images de synthèses. Le choc graphique est là et ne met que d'autant mieux le message en avant. A vrai dire, l'aspect visuel en général représente selon moi l'un des points forts du film. Le voyage de Wall-E dans les étoiles est tout simplement beau : les images sont travaillées, les couleurs splendides, les déplacements des personnages très agréables.
Ce dernier point concerne avant tout une scène lors de laquelle Wall-E et Eve se retrouvent dans l'espace et improvisent une sorte de danse au milieu des étoiles, slalomant entre les moteurs du vaisseau et paradant devant des galaxies entières. Rien à dire, c'est beau.
Et il en est ainsi jusqu'au générique, résumé de l'évolution humaine magnifiquement imagé et présenté, qui plus est quand Peter Gabriel donne sa voix à la chanson finale.
En conclusion, Wall-E n'est certes qu'un film d'images de synthèse avant tout destiné aux enfants, mais son envergure dépasse largement celle du film pour enfant de base et son efficacité dans tous ce qu'il entreprend est irréprochable.
Lorsque je disais en début de critique que le film m'avait convaincu, je me rends compte qu'il ne s'agissait finalement que d'un doux euphémisme. Wall-E est pour moi une totale réussite et un grand coup de cœur qui mérite totalement le succès qu'il a reçu.