7, c'est avant tout pour le plaisir que j'ai eu d'admirer ce film. Une palette de couleur exceptionnelle, une photographie super soignée, ce qui n'est pas si récurrent que ça chez Allen... Dès le premier plan, on comprend que le film est hyper soigné et travaillé sur le plan pictural. Jolie surprise pour le casting : Jim Belushi excelle, Justin Timberlake se révèle être plus que convaincant en amoureux menteur (ou l'inverse) face à une Kate Winslet ex-comédienne de théâtre ratée, névrosée et lunatique, mariée à un mari gras qui ne pense qu'à l'amener pêcher. Petite déception personnelle à l'égard de Juno Temple qui agace au fur et à mesure que le film avance. Wonder Wheel déçoit cependant par son scénario qui ne renferme aucune surprise et qui est peu à peu abandonné.


Derrière ses tirs à la carabine, ses écritures vintages (néologisme) et le plaisir qu'elle donne à ses passants, la grande fête foraine de Coney Island devient rapidement un théâtre où chaque personnage joue sa propre tragédie, pour ainsi dire "theatrum mundi". La mise en abyme est installée : le spectateur regarde un film où des acteurs jouent leurs rôles, qui consistent à jouer des rôles, qui consistent à mentir à tout le monde, y compris à eux-mêmes. Deux heures de lamentation, de disputes et de cris. On notera quand même l'absence des funestes névroses de Mr. Allen et de son point de vue sur la tonalité tragique de l'existence : un bon point, car le film aurait été des plus alourdis. A la place, on aura droit à deux trois lines concernant la puissance de Shakespeare, la folie de Hamlet et le don de la littérature théâtrale pour illustrer la fatalité omniprésente qui nous accueille dès lors que nous naissons. Pas de mort, de la bienséance. Madame prend un amant qui lui ment et qui en aime une autre. Encore une infidélité mais cette fois-ci l'issue ne semble être joyeuse pour personne. Je dois avouer que le personnage de Richie reste un mystère pour moi. A chaud ou à froid, je ne sais pas vraiment comment l'interpréter autrement que simplement.


Peut-être est-il pyromane, et qu'il brûle tout ce qu'il touche étant donné que tout et tous s'effondre(nt) autour de lui ?


Comme je l'ai dit au début, le vrai argument de ce film, c'est l'esthétisme. La photographie est impeccable, les couleurs sont travaillées (bring me back to the 50's), la mise en scène est très souvent intéressante à observer


(cf. la scène où le couple Belushi/Winslet est filmé à travers une vitre alors que jamais oh grand jamais la caméra n'a respecté l'intimité du couple auparavant)


et le jeu de lumière -omniprésent et sans doute grandement symbolique- vient dilater nos pupilles pendant deux heures. Il est d'ailleurs amusant de noter que les lumières changent aussi rapidement que les sentiments/émotions humaines (surtout quand on est lunatique, n'est-ce pas Kate ?). Finalement, je dirai que Wonder Wheel, c'est plus un film de l'équipe de Woody Allen que de Woody Allen lui-même.


En bref, du rouge, du jaune, du bleu, du vert : c'est la foire aux couleurs qui nous feraient presque oublier tous les (gros?) petits défauts du film, le vacarme assourdissant des rires enfantins et de cette populace insouciante qui pense que la vie n'est que plaisir, à Coney Island. Mais... c'est qu'on aurait bien envie de s'y balader, à Coney Island, et de faire un tour de grande roue avec Justin.

cforcarlitta
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le 1 févr. 2018

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cforcarlitta

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