Alors que je vais entamer les deux films qu'il me reste à voir de Tsui Hark, je m'étais bien décidé à en garder des potentiellement bons pour la fin, mais aussi une oeuvre importante, ce qu'est Zu, un projet personnel qu'il a pu mettre en place après avoir du réaliser la commande All the Wrong Clues for the Right Solution.
On sent une évolution dans le cinéma de l'auteur Hong kongais, pouvant enfin se lancer dans le film de sabre, ici combiné au fantastique, et de pouvoir laisser exploser sa créativité, l'emmenant ainsi dans bien d'autres genres. Pourtant, difficile de s'enthousiasmer comme j'aurais tend aimé le faire devant Zu et, contrairement à bien des films qu'il fera par la suite, il y a un manque certain de sensation, mais aussi une ambiance moins forte, une mise en scène moins talentueuse, et quelques points qui auraient pu être pardonnés pour un film où il aurait été plus inspiré, sont ici exposés au grand jour.
On sait que c'est un cinéaste généreux, parfois trop mais souvent génial et proposant de mémorables invitations à voyager dans son cinéma, sauf qu'ici, ces idées ne sont pas forcément bonnes, et ne sont pas rattrapées par son talent caméra en main. L'histoire des sourcils en est un exemple, ici ça sonne parfois même un peu ridicule, tout comme on tombe par moment dans un côté incompréhensible, sans qu'il y ait une ambiance forte pour compenser cela. J'en attend surement trop de Tsui Hark, mais il n'empêche que ce Zu n'atteint à aucun moment la maestria, qu'elle soit narrative ou visuelle, de bien d'autres de ses œuvres.
Heureusement, on est très loin d'être face à un mauvais film, et ici on pourra notamment apprécier l'humour, les personnages ainsi que quelques combats, virevoltants à souhait. L'alchimie entre le fantastique et la mythologie donnent une étonnante mais plutôt prenante atmosphère, sublimée par des décors adéquats et des effets-spéciaux plutôt bien foutus, du moins allant bien avec l'ambiance. On pourra enfin apprécier des comédiens plutôt bons, ainsi qu'un ton qui m'a parfois semblé ironique à l'image de la description du gentil, de quoi tout de même rester sur une bonne note.
Imparfait sur bien des points, Zu n'en reste pas moins une oeuvre généreuse, permettant à Tsui Hark de libérer sa créativité et enfin mettre en scène le film de sabre, ici teinté d'un fort aspect fantastique et d'un mélange des genres annonçant quelques très grandes œuvres qu'il fera par la suite.
Ce sera un échec au box-office, ce qui poussera Tsui Hark à fonder, au coté de sa femme, la productrice Nansun Shi, la maison de production Film Workshop qui lui permettra de laisser libre court à ses inspirations, et qui débutera avec le remarquable Shanghai Blues en 1984 avant de pleinement prendre son envol.